Lorsque l’on admire une peinture, l’esprit humain essaie de recréer ce qui se passe dans la scène. Quel est l’histoire des personnages de la peinture ? Comment se sont-ils retrouvés là ? Pourquoi sont-ils dans cette position ? Pourquoi la lumière est-elle si sombre ? Tant de questions que Roy Andersson nous pose dans son dernier film « About Endlessness ».
Le film est un subtil mélange entre la peinture et le cinéma. Une succession de scènes picturales et minimalistes qui redonne ses lettres de noblesse à la composition d’image. Plusieurs scènes s’enchaînent sans qu’elles n’aient de réels liens entre elles. Des cauchemars d’un prêtre sur sa propre crucifixion jusqu’à une scène de ménage dans une poissonnerie en passant par les derniers jours d’Adolf Hitler dans son bunker, les scènes passent comme l’on passerait les peintures dans un musée.
Les scènes commencent toutes d’une manière spécifique, elles sont d’abord immobiles et fixes, les acteurs ne bougent pas et le temps semble figé. Puis après quelques secondes, la vie commence à s’animer comme si la caméra insufflait une âme à la scène. Et c’est là toute la finesse de l’oeuvre ; la caméra permet à la peinture de respirer.
Doté d’un symbolisme et d’un questionnement sur la vie et la mort, une des scènes fortes du film est ce prêtre qui, à la suite d’un cauchemar où on le voit aller sa crucifixion une croix sur son dos, se questionne sur sa condition humaine et perd la foi. On le voit aussi dans la salle arrière de sa paroisse en train de boire le vin qui doit être servi à la messe. Ivre, il donne l’eucharistie aux fidèles qui l’attendent religieusement sur leurs genoux.
Le film nous questionne sur notre condition humaine en montrant des scènes banales mais puissantes de la vie. En mettant en avant le minimalisme et la composition d’image, le réalisateur pose la question ; si la caméra donne vie aux peintures, qu’est ce que donne vie aux Hommes ? Une interrogation subtilement posée dans un film où le fond et la forme coïncide avec finesse et intelligence.