Ce court métrage de Jean-Daniel Pollet est tout à fait remarquable. Un pur film de cinéma, avec une sensationnelle perception du réel.
Le film commence silencieusement, par un mouvement de caméra qui introduit le personnage principal (Michel Melki) dans la salle de danse. La caméra le suit en plongée jusqu'à former un plan d'ensemble du lieu principal. C'est alors que la musique éclate.
Ce film, c'est presque un documentaire tant sa minutie, son attention au réel atteignant le niveau d'un Jacques Becker est percutante. Si l'ambiance du bal reste ancrée dans son époque (musique jazz), les évènements (ou la décomposition géniale de très peu d'évènements) qui nous sont présentés ont une saveur intemporelle.
Les jeunes gens qui se courtisent, les femmes qui se rendent désirables, les hommes à l'affut, les danses qui commencent calmement pour devenir temporairement euphoriques, c'est le temps de l'ivresse. Et au milieu de tout ça, notre protagoniste, un jeune homme timide qui n'ose pas aborder les jeunes femmes pour les inviter à danser, et qui voit autour de lui les autres hommes réussir.
Le montage joue un grand rôle, notamment dans les grands moments d'ivresse, ceux où la gambille se déchaîne. On a des enchainements rapides de plans sur les danseurs, des visages en transe, pris dans la folie, un joli plan très court sur un enfant qui regarde en l'air, se demandant ce qui se passe.
Et notre protagoniste attend son tour, il attend d'avoir le droit à cette ivresse.
Et lorsque la fête prend une tournure "bal costumé", il a droit un bref instant à sa petite danse. Puis la jeune fille lui échappe. Alors il s'assoit, se regarde un bref instant dans le miroir, et tout s'achève là dessus.
Ces vingt minutes de visionnage sans dialogue portées par la musique sont une expérience recommandable à tous.
C'est un court-métrage à la fois joyeux, léger, dur, cruel, un fabuleux cocktail d'émotions. Du cinéma quoi.