Critique n°348: La leçon de cinéma de Denis Villeneuve

L’année 2016 est sur le point de s’achever et nous avons été encore gâté en ce qui concerne le cinéma. 2016 sera une belle année du point du box-office avec tous les films de super-héros et les grandes franchises qui ont attiré les foules dans les salles obscures même si je pense que l’année 2017 sera encore plus impressionnante à ce niveau avec des films très attendus comme les Gardiens de la Galaxie 2, Fast and Furious 8, Spider-Man Home Coming ou encore Dunkirk de Monsieur Christopher Nolan. Alors que demain sortira le nouveau Star Wars que j’attends avec impatience, aujourd’hui j’ai envie de vous parler d’un film en particulier, le nouveau film de Denis Villeneuve nommé Premier Contact et qui est pour moi le meilleur film de cette année 2016. Jusqu’à présent, je voyais Eddie The Eagle comme le meilleur mais ce que m’a donné comme sensation Denis Villeneuve avec son nouveau film est indéfinissable. Premier Contact ou la leçon de cinéma de Denis Villeneuve.
Premier Contact est un film de science-fiction, j’ai envie de dire le film de science-fiction que l’on attendait plus. On suit l’histoire de Louise Banks et de Ian Donnelly, une linguiste et un docteur en métaphysique qui sont appelés à comprendre le langage des extra-terrestres qui viennent d’arriver sur notre belle planète bleue. A travers une sorte de voyage initiatique ou la science du langage se mélange avec la science-fiction, Denis Villeneuve nous sert sur un plateau d’argent le renouveau du film de science-fiction incluant des extra-terrestres dans l’histoire donc, aux antipodes d’Interstellar de Christopher Nolan mais au centre de 2001 : L’odyssée de l’espace de Stanley Kubrick et Rencontre du troisième type de Steven Spielberg.
Premier constat que je peux faire sur ce film c’est que je ne m’attendais pas à être si émerveillé devant si peu d’explosions et de combat. C’est la première grande force du film, Villeneuve utilise des effets spéciaux classiques, il reste dans l’intimisme de son œuvre, voulant nous faire réfléchir plutôt que de nous montrer ce que des comme Independance Day nous a déjà offert. Là où la grande force d’Independance Day était dans l’affrontement entre humains et extra-terrestres, Premier Contact nous offre un autre type de conflit : savoir si l’humanité peut s’entendre sur des problèmes touchant le monde entier. Donc, je ne veux pas entendre des commentaires disant : « ouais mais c’était nul, y a pas d’actions, ça bouge pas » : non le film ne nous offre pas un grand spectacle d’effets spéciaux, il nous offre un autre genre de spectacle, tout aussi important.
A votre avis, comment est-ce que nous réagirions si nous étions confrontés à l’arrivée de vaisseaux spatiaux dans notre ciel ? Comment est-ce que l’espèce humaine se comporterait-elle face à des phénomènes que notre science serait complètement incapable d’expliquer ? Comment réagirions-nous si nous nous apercevions que nous ne sommes plus les rois du monde ? Que certaines espèces seraient largement plus évoluées que nous ? Et bien c’est là tout l’enjeu de Premier Contact. C’est pour ma part la première fois que j’ai la possibilité de voir un film traitant du sujet complexe des extra-terrestres comme le film nous le propose : c’est la première fois que je vois un film qui nous propose une vision non dangereuse des extra-terrestres dans le sens où on ne va pas directement les juger mais bien essayer de comprendre qui ils sont et que sont-ils venus faire sur la Terre. Denis Villeneuve nous offre une réflexion anthropologique sur un phénomène que nous ne serions pas capable d’expliquer.
Il y a tellement de choses à dire sur ce film, on peut expliquer de tellement de manière pourquoi il entre directement au panthéon des meilleurs films de science-fiction de l’histoire du cinéma, pourquoi il s’en va côtoyer les étoiles. Premier contact est plusieurs choses : tout d’abord un grand film de science-fiction, ensuite, une claque visuelle et émotionnelle et enfin un conte humaniste profond et réfléchie qui nous montre que l’humanité est capable de grandes choses à travers les deux personnages principaux du film. Je vais donc revenir sur ces trois éléments que je juge parfait pour décrire ce film.
Denis Villeneuve ne fait pas partie des réalisateurs qui aime Hollywood, il préfère rester dans son cercle indépendant et nous offrir des films come Prisoners ou Incendie. On peut presque dire que Premier Contact est le seul film de Villeneuve qu’Hollywood aurait pu vouloir s’arracher. Mais non, Villeneuve, avant de s’attaquer à la suite de Blade Runner et donc, passer le cap de l’industrie hollywoodienne a décidé de faire ses preuves dans le domaine complexe de la science-fiction. Complexe dans le sens où tout a été fait ou presque et qu’imposer un film de science-fiction est de plus en plus compliqué de nos jours. Mais lorsque que Villeneuve décide d’adapter la nouvelle « Histoire de ta vie » dont le nom de l’auteur m’échappe, rien ne dit que le film qui pourrait en découler serait un monument du cinéma mais pourtant, Villeneuve et son équipe l’ont fait.
Villeneuve a eu l’intelligence de ne pas faire la part-belle aux effets spéciaux spectaculaire même s’il est évident que le film est rempli d’effets spéciaux ce qui est logique pour un film de ce genre-là. Mais pour la première fois depuis longtemps, c’est bien l’homme qui est au centre de l’histoire et j’entends par-là le fait que l’homme prime sur les effets spéciaux, que c’est la nature humaine que Villeneuve veut essayer de nous expliquer à travers ce conte futuriste. Mais Villeneuve voulait quand même montrer qu’il sait faire de la science-fiction, ce qui n’est pas donné à tous les réalisateurs. C’est ainsi qu’il nous offre des effets spéciaux de nature humaine, un peu comme George Lucas l’avait fait avec la trilogie originale de Star Wars, Villeneuve a demandé à son équipe pour les effets spéciaux de reproduire des effets spéciaux à l’échelle humaine, comme s’il avait voulu faire des vaisseaux, des heptapodes des maquettes et non des simples images de synthèse et c’est là que Premier Contact se différencie des autres œuvres du genre, c’est à travers cette recherche de design des effets spéciaux que Villeneuve nous ébahit pourtant j’ai vu beaucoup plus impressionnant mais cela prouve que l’intimisme est toujours une force dans ce genre de film.
Passons au deuxième point important concernant le film : l’émotion du sujet. A quoi reconnait-on un grand film de science-fiction ? Il existe plusieurs degrés pour définir ce qu’est un bon film de science-fiction selon moi : l’émotion, la qualité visuelle, le sujet, l’impression d’être devant des images folles. Premier Contact nous offre ce qui est pour moi le plus important dans un film de science-fiction : l’émotion. Comme Interstellar nous offrait une bonne dose de larme, Premier Contact m’a profondément touché ne serait-ce que par la scène d’introduction magnifiquement tragique qui nous place directement dans une position de faiblesse face au film, on sait que l’on va être bouleversé par le film. L’émotion est rangée dans plusieurs catégories par Villeneuve, il y a l’émotion humaine, l’émotion que l’inconnu nous fait éprouver, l’émotion d’une mère, l’émotion de voir que l’humanité peut faire des grandes choses mais celle sur laquelle Villeneuve met l’accent est bien l’émotion d’une mère à travers le personnage de Louise Banks qui va découvrir toute la vérité sur sa vie mais je n’en dirai pas plus pour ne pas spoiler le film. L’émotion de la découverte est incarnée par le personnage de Ian Donnelly qui se rend compte que la science humaine n’est qu’un poussin encore dans sa coquille qui ne demande qu’à éclore, on a l’impression de voir un enfant face à des cadeaux de Noël quand on le voit découvrir de nouvelles choses. La dernière émotion sur laquelle Villeneuve met l’accent est l’émotion de l’inconnu, incarnée par Louise Banks et Ian Donnelly : on voit dans leurs yeux la fascination et la peur que ces grands vaisseaux et leurs habitants peuvent procurer chez eux. Et on ne pourra jamais assez remercie Amy Adams et Jérémy Renner pour leur performance absolument éblouissante qui permet aux deux personnages principaux d’être plus humain que jamais.
Dernier point sur lequel je veux revenir c’est la volonté humaniste avec laquelle Villeneuve nous offre Premier Contact, c’est une partie que je ne pourrai pas développer outre mesure car cela impliquerait de montrer des passages de l’intrigue et je ne veux vraiment pas gâcher le plaisir. Tous ce que je peux vous dire c’est que le personnage principal de cette histoire n’est Louise Banks ou Ian Donnelly ou bien encore les extra-terrestres non, le personnage principal est l’humanité. Cette humanité qui fait de nous des humains, avec nos peurs et notre méfiance pour ce que l’on ne connait pas, avec notre courage pour permettre à notre espèce de perdurer, avec l’amour que l’on peut éprouver pour les autres qu’il soit amical, amoureux (dédicace à mon ange que j’aime de tout mon cœur), ou bien maternel, fraternel ou paternel Premier Contact nous rappelle qu’une action peut tout changer et que l’inconnu ne doit pas être rejeter.
Je vais finir par parler des performances des acteurs dans ce film. Incontestablement, Amy Adams confirme son rang d’étoile montante du cinéma en jouant le rôle de Louise Banks, une linguiste et mère d’une jeune fille. Amy Adams joue toute en émotion, ne laissant paraître que ses émotions et ses faiblesses, on sent que ce rôle était fait pour elle puisqu’elle a accepté de le prendre alors qu’elle a décidé de faire une pause dans sa carrière pour se consacrer à ses enfants. Le deuxième rôle principal est joué par le talentueux Jérémy Renner connu pour son rôle dans Avengers et son rôle dans Mission Impossible qui joue régulièrement dans des rôles de composition comme ici où il incarne Ian Donnelly, un docteur en métaphysique. Renner lui joue sur l’émerveillement pour jouer son personnage, on a l’impression qu’il joue un grand enfant fan de science-fiction. L’alchimie entre les deux acteurs est parfaite, on sent qu’ils se connaissent et qu’un lien d’amitié les lies. Je ne me permettrais pas de juger la performance de Forest Withaker qui possède un rôle trop secondaire pour que je puisse juger sa performance.
J’en ai fini avec le chef d’œuvre de Denis Villeneuve qui est pour moi le film de cette année 2016 et même si je sais que Rogue One va être un excellent film, jamais il ne pourra me faire atteindre le degré d’émotion que j’ai atteint avec Premier Contact. Ce film est d’hors et déjà au panthéon des meilleurs films de l’histoire du cinéma. En ce moment, on se demande beaucoup pourquoi l’industrie du blockbuster fonctionne autant et bien Premier Contact prouve que le cinéma en quelque sorte classique dans le sens où il nous offre une vraie réflexion existe encore. Amy Adams et Jérémy Renner mérite largement d’être reconnus suite à leurs performance dans ce film et même si Premier Contact va probablement remporter des récompenses, ce n’est pas pour ces récompenses qu’il faudra se souvenir de ce film mais bien pour son message d’humanité si fort dans ces temps si durs pour l’espèce humaine. Merci Denis Villeneuve.

Bastien Rae

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