Prends l'oseille et tire-toi ! par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Virgil est un pauvre gosse de Baltimore issu d'une famille quelque peu disparate. Le père est un être aux idées étroites et rigides et la mère d'une incroyable naïveté et d'une grande faiblesse. Le pauvre gamin hante les quartiers difficiles et se fait sans cesse rabrouer et humilier par les petits caïds du quartier. Complexé à outrance, le pauvre Virgil rate tout ce qu'il tente, lorsqu'il décide, dans un sursaut d'orgueil mal placé, de s'improviser voleur à la tire et même pilleur de banque. Pourtant sa situation pourrait s'arranger lorsque, par une pure coïncidence, il fait la connaissance de Louise, une adorable jeune fille compatissante aux désillusions de Virgil. La naissance d'un enfant, là encore, pourrait amener une stabilité à sa situation, mais rien n' y fait, notre pitoyable bandit continue ses frasques et reste incapable de gagner sa vie honnêtement. Pourtant, un jour , l'honneur suprême va enfin frapper à la porte...Virgil est considéré comme "ennemi public", à savoir quel sera pour lui le bénéfice d'une telle renommée...

Lorsque l'on voit ce second film de Woody Allen en tant que réalisateur, on a le sentiment d'assister aux mésaventures d'un certain Charlot. Virgil est un être faible, maladroit, complexé. En fait, il n'a pas grand chose pour plaire. Pourtant, c'est grâce à son insignifiance qu'on finit par s'apitoyer sur lui et à l'aimer. Ce gangster minable au coeur d'artichaut arrive même, comme Charlot, à se trouver la plus ravissante des jeunes filles. Malgré cela la poisse le poursuit pas à pas et Virgil retombe sans cesse dans ses travers et dans les bras de la justice. De vols ratés en évasions loupées, la police est toujours présente pour le rattraper au moment voulu et les tribunaux pour le juger sévèrement. En fait il souffre de ne pas être reconnu par la société et surtout d'un énorme complexe d'infériorité qui le tenaille depuis sa plus tendre enfance. Habitué à tant de déboires dans sa morose existence, Virgil prend avec une philosophie surprenante les sanctions qui s'accumulent contre sa personne. En fait, la vraie place de celui-ci ne serait-elle pas la prison, plus sereine pour sa personne que la liberté?

Il exhale de ce film une fraîcheur, beaucoup de spontanéïté et de drôlerie. Les gags qui se succèdent à une allure effrénée sont d'une drôlerie énorme. On ne peut s'empêcher de rire en assistant à l'interview télévisé des parents de notre héros, équipés de faux nez et de fausses moustaches. Inoubliable cette évasion loupée, entreprise un soir de pluie avec un pistolet sculpté dans un morceau de savon ! Les situations tournent à la farce, voire au burlesque mais malgré cela, il se dégage de ce personnage escroc, certes, mais si tendre, une certaine émotion. Nous sommes face à un prestidigitateur faisant rire la salle à force de rater ses numéros. Avec un style saupoudré de Charles Chaplin voir plus récemment de Jerry Lewis, Woody Allen excelle dans son rôle de Virgil, surmené et fataliste. Son débit de parole est, comme d'habitude, des plus rapides, mais les dialogues tellement savoureux...Quant à sa jeune épouse amoureuse mais frustrée, Janet Margolin, elle enchante par sa beauté et nous surprend par la ténacité de son attachement à Virgil.

Découvrez ou redécouvrez ce film malheureusement assez oublié. Vous partirez dans une aventure insensée ponctuée d'un final des plus surprenants... comme l'ensemble de cette oeuvre.
Grard-Rocher
7
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Créée

le 3 févr. 2014

Modifiée

le 10 mai 2013

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