Qui se souvient encore de Luigi Comencini (1916-2007)? Il n'avait certes pas la flamboyance d'un Visconti, la démesure poétique d'un Fellini, la créativité barrée d'un Antonioni, mais il fit partie, pendant des décennies, de ce cinéma si foisonnant de talents. Du néo-réalisme d'après-guerre à la comédie "à l'italienne", en passant par le film politique ou social. Et même les westerns du Grand Sergio Leone. Lui-même aura laissé une œuvre considérable et inclassable de Pinocchio à l'Incompris, en passant par L'argent de la vieille, Casanova et même un épisode de Don Camillo en Russie !
Là, c'est sa fille Francesca, qui nous conduit dans Prima la vita ( la vie d'abord) à une introspection des rapports tumultueux qu'elle entretint avec son père.
Passées les joyeuses années de la petite fille qui gambadait librement sur les plateaux, elle se rapprocha, jeune fille, des mouvements révolutionnaires italiens qui conduisirent au tragique assassinat d'Aldo Moro. Et à la drogue aussi. Son père, pour la sauver, l emmène à Paris et lui fait connaître le cinéma, la littérature et les bords de Seine et l'ennui, parfois. Dans la douleur, elle devint elle-même réalisatrice mais de documentaires ou de biographies, histoire de se détacher de l'ombre tutélaire. Pour autant, au cours d'un tournage où elle court beaucoup comme assistante, Luigi, malicieux , lui glisse à l'oreille "nous faisons un bien beau métier, n'est-ce pas"?
Ce n'est pas le portrait complaisant d'un père à la fois droit et tourmenté, exigeant et libre d'esprit. Bref, d'un père qui fait comme il peut avec sa fille (ce qui a une résonance particulière pour moi, en passant). Et d'une fille sensible, intelligente, qui arrache son émancipation avec le temps et les épreuves.
Ce film est un chant d'amour bouleversant d'une fille à son père. Et au cinéma aussi avec de nombreuses références à l'écran.
Elle s'autorise d'ailleurs une fin très poétique, un peu surréaliste, à la Méliès...
Alors vive le cinémâââ, la vie d'abord, bien sûr, et l' amour toujours .
Tchao Bambino ☕