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J'y allais un peu à reculons, sans réelle objectivité, juste que j'adore Elvis Presley au point de pouvoir le placer sur piédestal et, plus le temps passe, moins j'apprécie Sofia Coppola ou du moins je ne m'intéresse plus vraiment à son cinéma après quelques déceptions... donc la voir potentiellement égratigner gratuitement le King, ça ne m'attirait pas.
Et pourtant, quelle erreur !
Priscilla est loin de tout cela, et c'est plutôt une réussite à bien des égards. Coppola fait le choix de s'arrêter uniquement sur sa période avec Elvis, le film débute sur la rencontre et se termine sur la séparation, et surtout la réalisatrice braque sa caméra sur elle. Elle met en avant une jeunesse chamboulée et de suite attachée à cette figure et une vie construite autour. Coppola contextualise, ne semble pas vraiment être dans le jugement ou du moins nous donne les clés pour l'être (ou non), elle s'arrête surtout sur la vision d'une enfant qui va se développer dans un contexte riche et d'abord passionnant mais qui va peu à peu se renfermer sur elle.
C'est tout cela qui marque dans Priscilla, comme l'impression que la vie est une prison, elle l'est, forcément, et c'est un choix d'ailleurs, mais est-ce réellement un choix dans ce contexte et si jeune ?
Si sa prison (dorée, n'exagérons pas!) apparaît de plus en plus visible, et devient une partie de l'objectif de Coppola, celle d'Elvis est un peu plus sous-entendu. Lui aussi apparaît comme un homme enfant, mais à ses dépends, on s'occupe de tout pour lui, jusqu'à lui dire quoi lire ou non, comment enregistrer etc, et la figure fantôme mais omniprésente du colonel Parker (qu'on ne voit jamais) est très bien pensée par Coppola, elle attire Elvis dans une prison dont il ne se libérera pas, et participe pleinement à celle de Priscilla.
La force de sa mise en scène se trouve notamment là, dans la bulle vécue par Elvis et Priscilla qui va prendre forme avant de disparaître petit à petit. Une liberté conditionnée à un Elvis d'abord plutôt présent avant de s'éloigner toujours plus, d'abord attachant mais rarement seul, et dont les principes et désirs ne sont pas forcément en adéquation avec ceux de Priscilla, au point que la frustration, dès le début d'ailleurs, soit régulièrement présente.
Pour mettre cela en scène, Coppola prend son temps, fait des choix forts, en axant sur elle notamment (et c'est frustrant, des fois, de rester avec elle lorsque le King part en tournée). Quelques fulgurances marquent, à l'image de la séquence de la chaise, lorsqu'Elvis et Priscilla sont (enfin) en tête-à-tête ou quelques sorties entre potes (Vegas, fête foraine notamment). Si elle tombe parfois dans de légers travers un peu facile (dans la mise en scène, la répétition ou même quelques points scénaristiques trop appuyés), il n'empêche en rien le film d'être une belle réussite, que l'on doit aussi à une parfaite direction d'acteurs ainsi qu'à une bande originale sans Elvis qui colle à merveille aux images.
Pari risqué mais réussi par Sofia Coppola qui sublime le couple Presley par le prisme de Priscilla, et met en scène une partition rodée et qui ne manque pas d'intelligence, de finesse ou de compassion, lorsque ce couple se retrouve, à diverses échelles, enfermées dans des prisons dorées.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs films de 2023, Carnet de bord 2024 et Ma vie dans les salles obscures
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le 15 janv. 2024
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