Blow-Up d’Antonioni fut un sacré moment de cinéma et ma perception du film se bonifie encore dans mon esprit. Et il en va de même pour ce Profession : Reporter découvert récemment. De la même manière qu’avec Blow-Up, mon sentiment était pourtant très étrange après coup. Le film se déroule en fait sur une sorte de faux-rythme où il n’y a pas tellement « d’évènements » en tant que tel, tout est très calme mais le film a ce qu’il faut de mystère pour rester suffisamment captivé. De ce fait je n’ai pas décroché un seul instant, j’étais envoûté par le film, son rythme, son histoire, ses personnages et l’ambiance qu’il dégage.
Profession : Reporter est d’abord un film sur l’absurdité de l’existence et finalement sur sa fatalité. C’est la rencontre de deux âmes errantes, perdues dans ce vaste monde sans réels buts à atteindre. Jusqu’à un point où le désespoir pousse l’un des protagonistes à changer son identité pour vivre à travers les yeux d’un autre, pour vivre une aventure. On illustre ici un sommet de voyeurisme où le personnage de Nicholson va devenir l’autre jusqu’à scruter les moindres détails de sa vie pour mieux se les approprier. C’est aussi en cela que le film est fascinant puisque nous progressons avec lui vers l’inconnu, à la découverte d’une vie qu’il ne fallait peut-être pas emprunter. Et nous pouvons aussi nous poser des questions sur notre propre existence, nos propres barrières dont on ne peut s’échapper que par l’esprit. Mais c’est surtout la relation Nicholson-Schneider qui porte le film avec un véritable souffle romantique qui m’a le plus touché. Rien de plus beau qu’une liaison entre deux êtres perdus qui cherchent ensemble une échappatoire, dépassés par ce qui se passe.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la mise en scène d’Antonioni est d’une beauté absolue. Le cinéaste offre finalement une réalisation épurée qui rend service à ses personnages, qui expose leurs âmes. Sans détails superflus il va capter l’essentiel avec toute l’intensité qui se dégage de cette relation atypique. L’absence de musique est également un élément positif, cela rend le film encore plus vrai je trouve, plus pur. Car si ce n’est pas forcément réaliste, ça n’en demeure pas moins vrai. Et quand le film n’est pas épuré, il propose des séquences virtuoses comme ce fameux plan-séquence vers la fin où l’on sent, à temps réel, qu’une conclusion dramatique se dessine. Un très grand moment de cinéma. Et la confirmation qu’il faut que je me consacre davantage à la filmographie d’Antonioni.