Ou comment défendre, pendant près de deux heures, l’idée aujourd’hui répandue qu’aller voir ailleurs aide un couple à tenir sur la durée. Et quel ailleurs ! Voici notre Gatsby le Magnifique en séducteur diabolique. On nage en plein Fifty Shades, quelques décennies auparavant, et la relation sadomasochiste en moins (quoique). Ce n’est pas tant le postulat qui pose problème ici que la résignation de la femme qui accepte, le temps d’une nuit, la position d’objet qu’une société n’a de cesse de lui renvoyer. Alors le film essaie de justifier la chose, soit en jouant l’argument de la détresse financière, soit en plaidant pour le droit à l’expérience d’ailleurs bénéfique pour tout le monde. En prétendant livrer un récit d’apprentissage où l’infidélité serait le tremplin vers la fidélité, Adrian Lyne banalise la notion même de couple qu’il oriente vers une maison à trous (dans tous les sens du terme). Car nul libertinage ici : les protagonistes ne jouent pas un seul instant, en dépit de la présence d’un casino. C’est du sérieux, et c’est honteux. Proposition indécente légitime la matérialisation de l’amour en enrobant l’ensemble dans le miel d’une romance érotique des plus mièvres ; il a d’ailleurs une ponctuation adaptée à sa dramaturgie : le nichon de Demi Moore, partout. Il faut avouer que l’ensemble repose sur un contre-sens total : affirmer que les sentiments ne s’achètent pas tout en mettant en scène la fascination d’une femme pour l’homme qui l’entretient au point d’éprouver des sentiments à son égard. Dès lors, ce cher Robert Redford campe une position dangereuse – indécente dirons-nous – puisqu’il angélise cette monétisation de l’amour. Il trouve son pendant non dans le mari mais dans l’avocat rédacteur du pacte diabolique qui affirme d’ailleurs qu’en le consultant au préalable, les époux auraient pu au moins obtenir le double de la somme convenue. Seul point positif : John Barry est là, tente d’insuffler un tant soit peu de poésie dans cette débauche moralisatrice et malvenue.