Après 12 ans de mariage, Prudence et Gerald Hardcastle (Deborah Kerr et David Niven, géniaux) ne peuvent plus se supporter, ne se fréquentant qu’aux repas. Le frère de Gerald (Robert Coote) lui ayant annoncé que sa femme Grace (Joyce Redman) est tombée enceinte par la faute de leur fille Geraldine (Judy Geeson) qui lui volait ses pilules contraceptives et les remplaçait par des cachets d’aspirine pour coucher avec son fiancé Tony (David Dundas) à leur insu, Gerald a une idée. Afin de vivre ouvertement avec sa maîtresse Elizabeth (Irina Demick), il décide de révéler au grand jour la relation qu’il pense que sa femme entretient avec son médecin. Il remplace donc à son tour les pilules contraceptives de Prudence par des cachets d’aspirine. Mais il ignore que leur servante Rose (Vickery Turner) pille elle-même les réserves de pilules de Prudence pour pouvoir fréquenter leur chauffeur Ted (Hugh Armstrong), et plus car affinités, sans se faire trahir par des signes extérieurs de grossesse. Lorsque le printemps arrive, c’est donc tout naturellement qu’une flopée d’heureux événements s’annonce à l’horizon. Heureux ? Rien n’est moins sûr…


En mai 1968, alors que la France était à nouveau plongée dans les heures sombres de son histoire, sortait en Angleterre un film qui décidait de s’amuser des évolutions que connaissait la société d’alors, plutôt que de s’en offusquer. Avec Prudence et la pilule, Fielder Cook nous livre donc une vision amusée de sujets délicats tels que la contraception, le divorce et les relations sexuelles hors-mariage.
Dans la lignée d’un Ailleurs, l’herbe est plus verte de Stanley Donen (parallèle renforcé par la présence de Deborah Kerr en épouse déçue), le film de Cook s’avère un vaudeville élégant et raffiné, délaissant brillamment toute vulgarité pour se concentrer sur des personnages savamment écrits, au sommet desquels le duo Kerr-Niven étincelle. D’autant que la caméra de Ted Moore, un des directeurs de la photographie les plus talentueux de la profession, parvient à saisir parfaitement l’étincelle de vie de chaque scène, magnifiant les décors somptueux de John Jarvis et les costumes d’un charme fou de Julie Harris.
Toutefois, au-delà de ses nombreuses qualités formelles, Prudence et la pilule s’avère en réalité le miroir négatif du film de Donen, étant donné qu’à l’inverse de ce dernier, la morale est durement malmenée par le scénario jusqu’à une fin qui,


au lieu de réunir les deux époux, consacre leur séparation par un divorce et un remariage de chaque côté.


A l’heure de la contraception et des relations sexuelles à tout âge, à tout moment, avec n'importe qui, le mariage ne signifie plus rien, et c’est bien un des constats, peut-être bien involontaire et donc d’autant plus dur, que pose cette comédie joyeusement immorale. Cela dit, si le mariage en prend un coup, la contraception aussi, et c’est là que le film devient d’autant plus savoureux qu’il n’est pas certain que le constat soit beaucoup plus volontaire que le premier ci-dessus.
En effet, cet hilarant jeu de chassé-croisé entre maris, femmes, amants et amantes autour de la pilule et du refus de donner la vie, le sexe étant un pur instrument de plaisir, débouche sur


un échec complet de la contraception qui se termine pourtant en un joyeux happy end, chacun des personnages acceptant l’enfant non désiré avec un bonheur visible.


En achevant de liquider le mariage, un tel aboutissement nous apporte tout de même la plus belle leçon du film, en nous montrant que la vie finit toujours par l'emporter sur l’orgueil et l’égoïsme humains.
Revêtant des airs de politiquement incorrect à une époque où la contraception n’est même plus sujette à débat et où le refus de la vie est considéré comme normal, cette comédie paradoxale de Fielder Cook s’avère donc une pépite particulièrement jouissive, qui fait un bien fou.


*Je n'ai pas besoin de vous préciser d'où vient la citation, ce serait insultant...

Tonto
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le 7 mars 2018

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Tonto

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