Il y a de ces films que je considère comme surestimés qui m'énervent, et c'est le cas de Pump up the volume, pour lequel je ne comprends pas bien l'engouement.
Histoire de me soulager, je fais ressurgir un avis à chaud que j'avais écrit en mars :
Rien qu'à voir l'affiche et en connaissant rien qu'une once de ce qu'est l'intrigue, on s'imagine déjà le mec cool façon Wolfman Jack dans American graffiti qui, de sa voix ténébreuse, rend admiratif les jeunes gens qui l'écoutent. Christian Slater qui pose sur le poster laisse penser ça aussi, et il ouvre le film en voix-off avec quelques paroles cyniques qui vont droit à l'encontre des règles imposées par la société, notamment par l'institution scolaire, aux ados en plein mal être. La BO du film est évidemment importante et donc, par quasi-nécessité, agréable à entendre. Entre deux vinyles de musique plutôt cool, le personnage de Mark se fait passer pour "Hard Harry", un masturbateur compulsif qui se soulage à l'antenne. Il est déjà bizarre comme porte-parole de la jeunesse, mais il fait alterner ses conneries de bruits de pets pré-enregistrés avec des éléments non préparés, à savoir ses réflexions spontanées qu'il envoie sur les ondes pour quiconque veut bien l'écouter.
Non, ce qui est vraiment étrange, c'est d'apprendre que personne ne connaît l'identité de ce type parce que les auditeurs qui sont dans la même école se disent dans l'incapacité de savoir qui il est, parmi tous les nerds de l'établissement. Apparemment ils sont sérieux en affirmant cela, et ce qui est bizarre ce n'est pas qu'on ne puisse pas le trouver, mais le fait qu'il soit vraiment un nerd parmi d'autres. Le jour il porte des chemises à carreaux, des lunettes et baisse la tête, alors que le soir il a des vêtements plus décontractés, se sent à l'aise pour dire qu'il est tout nu et ne porte qu'un anneau autour de son penis, et il ne porte pas de lunettes. Concrètement, à part pour bien que le spectateur comprenne que le soir il est un mec cool, pour qui est-ce qu'il change comme ça d'apparence ? Quel est le vrai Mark, d'ailleurs ? Est-ce que son déguisement c'est celui du mec ordinaire ou celui de nerd ? Est-ce que ses lunettes ont une réelle fonction ; est-ce un déguisement qu'il ne met que pour aller en cours, ou est-ce que le soir il les retire et voit flou son poste de radio ?
En tout cas, contrairement à Clark Kent pour qui les lunettes ne sont qu'un artifice qui ne changent nullement qui il est au plus profond de lui-même, Mark change carrément d'attitude le jour en même temps qu'il change de vêtements. Ce type qui ose dire à l'antenne qu'il est chaud comme un hibou à 10 bites n'est pas capable de parler à quiconque une fois qu'il est en société. Mais ce genre de personne n'existe pas ! Comment le scénariste a cru pouvoir nous faire croire ça ? En plus l'acteur est Christian Slater, qui nous dit en live qu'il y a des gens qui ne sont pas assez beaux pour s'adresser aux autres sans problèmes. Mais fallait prendre un autre acteur, là c'est comme, disons, choisir John Travolta pour jouer un nerd en électronique (wink wink).
Bref c'est n'importe quoi. Je ne m'identifiais déjà pas forcément aux personnages des films de John Hughes, contrairement aux gens que j'ai vu hier dans le documentaire "Don't you forget about me" par exemple, mais là je ne me suis pas reconnu dans le personnage complètement improbable de Slater, ni en ce qu'il disait. Le personnage de toute façon n'a rien à dire de vraiment bien pensé, et face aux appels d'un homosexuel perturbé et d'un suicidaire, il apporte bien peu d'aide. Le film se veut à fond le porte-parole d'une génération troublée, j'ai bien l'impression que c'est son seul but, mais il ne dit rien qui corresponde aux ados et ne présente aucune idée ou message intéressant. Evidemment le personnage n'est pas plus malin que les autres, "I guess nobody has the answer" lui dit le garçon gay qui l'a appellé, mais justement là ça n'aurait pas été plus mal de se débarasser de ce qui plausible ici et que le réalisateur fasse passer à travers les dialogues ses réflexions profondes sur le sujet. Mais non, solution de facilité : le personnage n'a pas de réponse. Il n'est bon qu'à faire semblant de se branler, faire du play-back avec ses vinyles, et dire à quel point il déteste ses parents et l'école.
Les répliques sont tout de même bien écrites car c'est ce qui fait tenir pendant un bon moment au début du film, avec juste le personnage principal s'exprimant dans son micro. Et quand il est question de sujets plus graves, notamment ce suicide, il y a de quoi ne pas rester insensible, parce qu'après tout comment ne pas réagir à la musique dramatique qu'ils nous mettent en fond et à la simple évocation d'une chose pareille ? Seulement Pump up the volume ne comprend pas le mal adolescent, et ça ne suffit pas de faire débarquer tout d'un coup au téléphone un élève qui veut se suicider parce qu'il se sent seul, c'est trop facile. Et ça marche encore moins de nous montrer Slater faire semblant d'avoir quelque chose contre quoi se rebeller, ses parents ou son école, alors que rien ne cloche vraiment si ce n'est lui, comme c'est aussi le cas pour ses camarades.
Tant que le film ne rentre pas encore dans le vif du sujet ça va encore, mais vers 40mn on découvre qu'il est question d'un ado qui, grâce à sa radio pirate, soulève un mouvement chez les ados de son lycée qui se rendent compte qu'il ne faut pas se conformer à ce que la société veut qu'ils soient. Je pense quand même qu'ils passent d'une influence à une autre en suivant dès lors ce que leur dit de faire Mark, comme cette conne qui fout des objets dans le micro-ondes après que le personnage principal ait dit de se rebeller, mais c'est une autre histoire.
Ce qui m'a le plus affligé c'est que le réalisateur/scénariste n'ait pas compris les ados, contrairement à Hughes qui voyait juste, à part quand il décidait de partir dans un délire complet et assumé comme avec "Weird science". Et pourtant le scénariste de Pump up the volume impose son message comme s'il avait tout compris. Et c'est cette conviction qui fait vraiment mal à voir quand, à travers le personnage de Mark, il pose comme un fait ce qu'il imagine comme étant le problème des ados, et qu'avec les autres personnages se joignant au héros il appuye ses propos comme s'ils étaient une vérité absolue réunissant tous les adolescents du monde.
"I'm sick to be ashamed, not you ?" nous dit Mark, en faisant référence au fait que ses pensées et ses volontés ne sont pas correctes aux yeux de la société. "Sick to death" dit une fille devant sa radio, "Hallelujah" renchérit une autre, comme si ce que Mark disait était comme une épiphanie, alors que je comprends vraiment pas à quoi il fait allusion. Alors évidemment ces réactions des auditeurs m'ont paru complètement grotesques, et la suite où il dit "act crazy" et que tout le monde se met à danser, hurler, voire faire exploser son micro-onde, ça m'a paru tellement vain.
Les personnages ne savent pas contre quoi il se rebellent mais suivent leur nouveau leader, qui lui-même ne sait pas ce qu'il fait.
Tous font comme s'il y avait quelque chose contre quoi se révolter, et le pire c'est que le film donne raison aux ados devant leur écran qui se disent "le monde est fou, il n'y a que moi qui suis normal ou quoi ?" en inversant la tendance qui serait celle du monde réel. Les ados, même ceux qui viennent à l'école avec "fuck" inscrit sur leur t-shirt juste par provocation, ont raison, et ce sont les représentants de l'autorité qui ont tort. La méchante principale, le mal absolu dans le film, vire pleins d'élèves, vire une prof trop sympa, et à la fin on nous prouve bien que c'est elle le problème puisqu'elle se fait arrêter pour avoir rejeté des élèves sans raisons ou je ne sais quoi. Le film propose une vision manichéenne du monde qui s'inscrit dans la pure pensée révolutionnaire aveugle de la puberté, et caricature tout d'un côté comme de l'autre. Cet ado nerd, capable de détourner un appel, transformer une jeep en studio et tromper la police de diverses autres manières, est le seul à prendre la parole qui va soulever les masses parmi ses jeunes camarades (non mais sans blagues...), contre les méchants policiers qui veulent l'arrêter et la méchante principale.
Evidemment, ses parents sont mauvais à ses yeux aussi, alors qu'ils veulent juste l'aider à se socialiser. En tout cas ils sont trop bêtes pour comprendre que l'émetteur radio qu'ils lui ont offert pour qu'il appelle ses potes à New York sert peut-être, sait-on jamais si on se creuse le ciboulot, à créer une station de radio pirate ?
A la fin il se fait attrapper mais comme, disons, Rosa Parks qui s'est fait arrêter pour s'être assise dans un bus pour blanc, son geste n'aura pas servi à rien ! Car en effet, avant d'être envoyé en prison il a pu dire à tous ses auditeurs de créer leur station ! Oh, que c'est beau. Enfin ils sont genre une trentaien d'idiots à créer leurs stations aux noms d'émissions plus bêtes les uns que les autres, du genre "I am, are you ?", et à mon avis autant d'égocentrisme étalé sur plusieurs stations ne peut que mener qu'à un petit nombre d'auditeurs chacun, et finalement chacun va abandonner et oublier d'ici quelques mois leur ancienne idole, Mark.
Ah oui au passage, Mark, ce loser à l'école, s'est trouvé une copine. Oui, c'est n'importe quoi.
Le film commençait asssez bien, mais dès le début de la révolte immotivée ça m'a horripilé. Malgré les premières apparences, Pump up the volume est finalement bien débile.