Étriqué entre le propos de “La bataille d’Alger” de Gillo Pontecorvo en 1966 - le réquisitoire ultime sur le conflit algérien au cinéma - et l’ambiance glaçante et meurtrière de “L’ennemi intime” de Florent-Emilio Siri sorti en 2007, voici avec “Qu’un sang impur”, une nouvelle incursion dans cette guerre qui ne dit pas son nom. Le réalisateur français d’origine algérienne Abdel Raouf Dafri (scénariste d’Audiard avec “Un Prophète”) va filmer la guerre dans la guerre en renvoyant au front, le colonel Breitner (Johan Heldenbergh), un ancien légionnaire d’Indochine, que le cinéaste nous présente comme un homme brisé en proie à des crises post-traumatiques. Breitner - en véritable mix entre les personnages d’Albert Dupontel (“L’ennemi intime”) et Martin Sheen (“Apocalypse Now”) - a ramené d’Asie, de biens horribles cauchemars, mais aussi Soua Ly-Yang (Linh-Dan Pham) son pendant féminin, mais surtout son dernier rempart contre la folie. Nous sommes en 1960 - et bientôt : “De Gaulle va rendre l’Algérie aux Algériens.”, comme le dit une certaine Madame Delignières (Anne Mercier), qui, convaincue de la mort de son fils, le colonel Delignières (Olivier Gourmet) mandate Breitner, ancien compagnon de Delignières, pour la région montagneuse des Aurès. Breitner doit rapporter des preuves de la mort de Delignières avant un bombardement au napalm de l’armée française. Pour mener à bien la mission, Breitner et Soua Ly-Yang doivent monter une petite équipe hétéroclite. De guérilla, en embuscades, de massacres de villageois, en tortures et en exécutions en tous genres, mais aussi en moments de grâce, d’humanité et de bravoure, “Qu’un sang impur” ne manque pas de scènes chocs, âmes sensibles s’abstenir. Sans gratuité ni complaisance aucune quant à la violence frontale - dans cette période d’incertitude entre les deux camps - Abdel Raouf Dafri, qui signe là sa première réalisation, réussi à éviter le plus possible l’écueil d’un manichéisme maladroit, en faisant de son film, autre chose qu’un récit guerrier. Traitant de la psychologie propre à chaque individu par rapport au groupe - tout l’inverse de la guerre en somme - “Qu’un sang impur” est avant tout, une aventure à hauteur d’homme et chose plus rare, une aventure à hauteur de femme, magnifiée par des décors naturels somptueux, qui font oublier l’horreur, l'espace d’un instant !