Encore une histoire de vengeance?

En fait, le film ne ressemble que vaguement au Comte de Monte-Cristo. Cependant une vérité transparait sur les histoires de vengeance, c'est qu'elles se ressemblent beaucoup et se ressentent de la même manière.

Les permutations sont limitées (l’homme lésé cherche à se venger, l’obtient ou échoue), tout comme les satisfactions et les souffrances que peuvent ressentir celui qui poursuit ou celui qui est poursuivi.

La vengeance (limitée ou non) reste un principe populaire mais ce film parvient malgré tout à intégrer quelques détails inédits. Le lieutenant Hermes Papauran est le principal enquêteur de la police de Metro Manila ; il démissionne lorsqu'un grave cas de psoriasis éclate sur une grande partie de son corps. C'est un personnage dont l'angoisse psychique se manifeste somatiquement. Hermes ressent la culpabilité des crimes dont il a été témoin à travers une démangeaison incessante qui s'est propagée dans tout le cuir chevelu et le dos. Pourtant Hermès n’a fait qu' observer, pourrait-on dire, il n' a pas commis de crimes. C’est la version de la vérité d’Hermès ; étant donné sa position dans la police et sa propension aux accès de colère et de violence (nous avons un échantillon de cette colère au début du film) et étant donné la gravité de son état, on se demande s’il n’était qu’un témoin, d'autant plus que nous avons l'impression qu'Il se sent définitivement responsable.

Si Hermès est coupable, il est difficile de trouver un juge et un bourreau plus approprié que Primo Macabantay. Les enquêtes d'Hermès ont conduit à l'arrestation de Primo et à son incarcération pendant dix ans ; maintenant, Primo est sorti de prison et veut se venger d'Hermès.

La mise en scène de Diaz se situe dans le noir absolu. Ses scènes de nuit sont presque exclusivement composées d'ombres de cauchemar et d'un éclairage brutal (lesdites compositions adoucies par la palette plus subtile et plus granuleuse du 16 mm).

Pour raconter une histoire dure, il déploie en effet un objectif plus compatissant.

Diaz semble s'éloigner de la commodité de la haute définition du numérique moderne pour quelque chose de plus pratique.

Un procédé risqué, et ce pari semble avoir galvanisé le cinéaste. Sa narration délibérément méditative semble d'autant plus têtue, perverse, peut-être même héroïque.

Peut-être encore plus héroïque est la détermination de Diaz à poursuivre cette histoire de vengeance jusqu'à son amertume : en gros, la confrontation d'Hermès avec Primo.

Que peut apporter la vengeance ? La fin du film nous donne la réponse, mais je ne m'attendais pas à ce qu'elle soit aussi dure.

Starbeurk
7
Écrit par

Créée

le 22 août 2024

Modifiée

le 22 août 2024

Critique lue 8 fois

Starbeurk

Écrit par

Critique lue 8 fois

D'autres avis sur Quand les vagues se retirent

Quand les vagues se retirent
Cinephile-doux
6

Maladie de peau

3 heures et 7 minutes seulement pour Quand les vagues se retirent, c'est presque l'équivalent d'un court-métrage pour Lav Diaz, habitué à des durées bien supérieures. Pas de surprises cependant, il y...

le 7 juil. 2023

6 j'aime

3

Quand les vagues se retirent
Contrastes
6

Intrigue à Manille

L’ouverture est classique d’un polar. Après une courte introduction nous présentant le protagoniste, lieutenant de police et professeur à ses heures perdues, le réalisateur nous plonge dans les rues...

le 24 août 2023

2 j'aime

Quand les vagues se retirent
mvriusmrn
7

L'impossible rédemption

Hermes Papauran, enquêteur renommé de Manille et professeur à l’Institut de Criminologie, découvre que le gouvernement a orchestré le meurtre de dizaines de revendeurs de drogues. Dès lors, il...

le 30 août 2023

Du même critique

Zooropa
Starbeurk
7

Un clap de fin qui s'étire dans le temps...

C'est un album à écouter d'une traite tout seul le soir et c'est déjà une sacré expérience, comme si la musique avançait dans un futur proche un clap de fin qui s'étire dans le temps...Il est vrai...

le 11 mai 2018

5 j'aime

3

Minor Threat (EP)
Starbeurk
8

L'EP qui a posé la musique underground de DC sur la carte US.

Minor Threat a commencé avec Ian et Jeff de Teen Idles, puis a ajouté plus tard Brian Baker et Lyle Preslar à la basse et à la guitare respectivement. Armé de 8 chansons qui durent un peu plus de 9...

le 9 févr. 2021

4 j'aime

Everything Harmony
Starbeurk
7

L'histoire de la musique s'est terminée en 1976.

Everything Harmony sonne comme si l'histoire de la musique s'était terminée en 1976, mais c'est une année 1976 dans laquelle l'influence des Beach Boys n'a pas radicalement cessé d'exister (ce qui...

le 17 août 2023

3 j'aime

2