Permis de Tuer
Cette vingt-deuxième mission pour l'agent Bond, Quantum of Solace, a la particularité d'être une suite directe à son prédécesseur, le remarquable Casino Royale, permettant à l'agent britannique...
le 23 nov. 2014
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J’aime James Bond. Cependant, et n’en déplaise aux puristes et fans des premières heures de cette longue série, j’aime le nouveau James Bond, avec Daniel Craig. Le fait qu’un agent secret qui déjoue les plans d’un méchant maléfique, et qui finit avec sa chemise blanche comme neige ne me fait ni chaud ni froid. Ou même ces premiers films qui tournent presque à la comédie, comme le premier Casino Royale avec David Niven est quelque chose que je ne peux assimiler au personnage de James Bond. De plus, dans les anciens films, Bond est quelqu’un de de neutre, et sans passé. C’est pour cela que chaque changement d’acteur n’était pas négatif pour la série, car tout le monde, selon certains critères bien évidemment, peut se glisser dans la peau du personnage.
En revanche avec ce reboot de la série avec Daniel Craig, on explore les fondations du personnage. Sa psychologie tortueuse et pourquoi il agit ainsi avec les femmes sont enfin explorés. Cela ne rend pas le personnage forcément plus humain, mais en tout cas il devient plus accessible, et enfin on peut comprendre ses motivations et ses raisons. C’est ainsi que, sans raison aucune, je me décidai à regarder Casino Royale de 2006. Une fois le film fini, j’étais convaincu qu’il s’agissait d’un bon film. Puis d’un coup, je me rendis compte à quel point il était infiniment supérieur à l’immense majorité des films d’action de ces dernières années. C’était même plus, en plus d’être un excellent film d’action, c’était aussi une très bonne pioche d’un point de vue générale. Des bons acteurs, une histoire cohérente, un très bon méchant, les pays visités mis en valeur, et quelques scènes cultes comme la course-poursuite du début et la scène casse... couille, si on peut le dire ainsi. Casino Royale était une réussite.
C’est ainsi que mes attentes fondées en Quantum of Solace était assez haute. Et ainsi, telle fut ma déception. Et il est navrant que les choses se soient passées de cette manière. On voit clairement que le film a été affecté par la grève des scénaristes. On voit que certaines choses ont été faites au dernier moment et qu’on a prié pour que le tout colle plus ou moins. Et cela m’énerve, parce qu’il y avait tant de bonnes idées de bonnes intentions dans ce film…
D’abord, on ne peut pas omettre le fait que le montage est épileptique et limite vomitif. Pire que le fait de ne pas mettre en valeur le travail très esthétique cependant fait par la réalisation, c’est plus le fait qu’on ne comprenne rien à l’action qui se passe sous nos yeux. Premier exemple : la course-poursuite à pied du début, lorsque Mr White est capturé. Les images de la course-poursuite, dans une sorte de catacombe, sont entrecoupés d’images d’une compétition de cheval de la ville de Sienne. Je n’ai strictement rien compris aux deux événements. Quel est l’objectif de la course-poursuite ? Où se dirige le traître que poursuit James Bond ? On passe de plan extrêmement lumineux, aux plans très obscurs des catacombes… ma rétine en a pris un sacré coup. Juste après vient une scène que je trouve symptomatique du film. James Bond et le traître entrent dans une église en pleine restauration. Et alors s’ensuit une scène qui aurait pu être magnifique : cela a dû être un casse-tête et un exploit pour l’organiser et pour la filmer, mais le montage ne met tout simplement pas en valeur le travail qui a été fait.
Mais cependant la scène est sauvée, tout comme à l’image du film, lors du plan final, que je trouve simplement magnifique, lorsque James Bond arrive enfin à tirer sur son adversaire, alors suspendu par une corde, la tête en bas. La caméra alors, après avoir gigoté pendant deux minutes sans s’arrêter, se fige enfin, lors d’un bref instant, sur le visage impassible de James Bond. Ce sera le seul moment où l’effet épileptique sera compensé par une bonne idée de mise en scène, donnant une sensation de puissance assez intéressante.
D’autres bonnes idées sont présentes, comme le fait que la James Bond girl, Olga Kurylenko, alors qu’elle avait pratiquement la même expression faciale pendant tout le film, regagnent à la fin tout le manque de personnalité qu’elle n’avait pas, en ne succombons pas au charme de Bond. Ou encore les thèmes abordés, comme les différentes dictatures soutenues par les États-Unis au Moyen-Orient et en Amérique latine, ou encore la légère mention sociale mise en avant avec le manque d’eau et les entreprises privées qui la contrôlent. Franchement, une dimension sociale l’on lorsque l’on regarde un James Bond, ce n’est pas un peu inattendu ? Et surtout, je tiens à mentionner ce qui est pour moi la meilleure scène du film. Juste avant que James rencontre Olga, il entre dans un hôtel en suivant la piste d’un potentiel suspect qui semble s’y trouver. Le combat qui suit est juste magnifique. Très brève et intense, ce qui pour une fois, correspond à la mise en scène épileptique, la confrontation se finira d’une manière inattendue. L’adversaire s’effondrera par terre avec un bout de verre planté dans le coup, et l’on verra alors avec une froideur extrême comment il perd son sang, et comment son regard se perdra lui aussi, peu à peu dans le vide. Par-dessus lui, un James Bond impassible, qui lui scrutera l’horizon, sachant parfaitement ce qu’il fait et en maîtrisant la situation. Une scène froide et glaciale, qui m’a, et je dois bien le reconnaître, laisser bouche bée. C’est la seule vraie scène qui sert le scénario, c’est-à-dire, un James Bond qui effectue sa mission mais qui est aussi à la recherche du responsable de la mort de Vesper, la seule femme qu’il ait vraiment aimé. C’est la seule scène où la véritable rage, mélangée au contrôle impassible de James, est mise en avant. Seul moment où l’on voit véritablement, et en parfaite alchimie, le devoir d’un agent secret contre sa rage personnelle.
Mais tout ceci est désespérément éclipsé par des erreurs ou autres mauvaises décisions prises. Tout est trop gros, tout est envoyé au spectateur pour qu’il y croie, mais on n’arrive jamais vraiment à gober ce qui se passe à l’écran. Le méchant ne m’a fait ni chaud ni froid, tout comme le général Madrano, mais je pense que c’est plus un problème d’écriture que des acteurs. Le personnage de Mathis est mal utilisé, et sa réconciliation avec Bond après les événements de Casino Royale n’est pas crédible une seconde. On dirait qu’il est juste là pour rappeler à James à quel point Vesper l’aimait et tout ce qui suit. C’est gros et poussif. Pour faire simple, les interactions entre les personnages semblent parfois trop artificielles. Ceci est le résultat malheureusement d’une écriture approximative et les morceaux recollés à l’arrache. Même la très mignonne Gemma Arterton est mal utilisée. Son innocence et son accent british aurait vraiment pu être bénéfique au film, mais malheureusement, elle passe à la trappe bien trop vite. Même l’importance de Mr White (confirmée dans Spectre, le dernier James Bond sorti) et de l’organisation est mal amenée. On sent mal leur contrôle absolu de la situation, ce qui empêche véritablement de sentir un quelconque danger planer sur les protagonistes.
C’est pour cela que je trouve que Quantum of Solace est un incroyable gâchis. Des excellentes idées, un passage scénaristique obligatoire pour comprendre le James Bond incarné par Daniel Craig, une esthétique ma foi réussie, mais le tout gâché par une écriture bâclée et un montage vomitif. C’est pour cela qu’il sera pour moi difficile de mieux exprimer ma tristesse concernant le résultat final de ce film. Heureusement, cette erreur de parcours sera rapidement corrigée avec le très bon Skyfall de Sam Mendes. Mais cela, c’est une autre histoire…
Créée
le 27 nov. 2015
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