Avec "Quatre mariages et un enterrement", Richard Curtis inventait tout simplement - mais il n'y a absolument rien de simple là dedans - un nouveau modèle de comédie sentimentale, basée sur les codes de l'humour anglais et son sens ébouriffant de l'understatement, adaptés au "marché international", c'est à dire sans "trouble" profond. Débarrassés de toute vraie "weirdness", qui constitue pourtant le secret profond de cet humour fondamentalement déviant, masochiste et pourtant impérieux, les personnages et les situations fantastiques du film font rire de bon cœur n'importe quel spectateur de la planète, tout en flattant son auto-estime, puisque le spectacle proposé ici est fin, intelligent, avec juste ce qu'il faut de grossièretés bien assenées et de sexe polisson pour que la transgression pointe son nez sans choquer personne : qui par exemple serait indigné par le couple d'homosexuels - qu'on doit bien sûr enterrer puisqu'on ne saurait les marier -, alors qu'ils ont une telle âme de poètes !? Alors oui, l'efficacité comique du film est telle qu'il se classe facilement parmi les plus grandes réussites du genre, sans même parler du fait qu'il lança la carrière du merveilleux Hugh Grant, et que la sublime Kristin Scott Thomas y brillait déjà de milles feux (On est en droit de se demander pourquoi Charles lui préfère une fade Américaine, mais bon...). Alors oui, je sais, il ne faut pas cracher dans la soupe, les belles comédies sont tellement rares, il suffit simplement de ne pas être dupes de ce que l'on voit, de ce que l'on aime même : une sorte de prototype unique, inégalé par la suite (Curtis lui même n'y arrivera pas, malgré plusieurs tentatives honorables), parfaitement et très proprement construit pour plaire à tous. [Critique écrite en 2013]