Louis XV trop jeune, c'est le duc d'Orléans qui assure la régence, non sans mal, avec un complot qui se trame en Bretagne, avec l'idée que Philippe V d'Espagne, petit-fils de Louis XIV, puisse lui aussi accéder au trône de France, ainsi que des ambitieux autour de lui.
Bertrand Tavernier trouve un cadre à sa mesure, et il tient à dépeindre un début de XVIIIème siècle sous son véritable jour, notamment pour la question du libertinage alors fort présent dans la vie du duc d'Orléans. Ce cadre, c'est aussi celui d'une France en proie à des complots, pris dans des jeux d'alliances. Pour mettre ces idées en scène, Tavernier va s'appuyer sur trois personnages forts, symbolisant ces différents concepts et la France d'alors.
Philippe Noiret se retrouve dans la peau d'un duc, devenu régent, mais peu attiré par le pouvoir, vivant dans une certaine débauche, aimant les plaisirs de la chair et de la vie, mais conscient de la situation de la royauté et du monde dans lequel il vit. Il y a une mélancolie dans cet homme, sachant ce qu'il a fait et ce qu'il doit faire pour maintenir la situation et offrir au futur Louis XV un royaume qui tient debout. Il est secondé par Jean Rochefort qui se retrouve dans la peau d'un abbé puissant et ambitieux, voulant devenir archevêque et prêt à tout pour le faire. Il symbolise les jeux de pouvoirs, les manipulations ainsi que l'ambition.
Ces deux-là sont confrontés à Jean-Pierre Marielle, immense et habité en marquis de Pontcallec qui, tel un Don Quichotte breton, sera prêt à tout pour faire face aux taxes de l'état et créer une république libre de Bretagne. Tous trois sont formidables, et les personnages symbolisent la vision de la France d'alors, et Tavernier, de manière plus ou moins approfondie, aborde à travers eux l'importance de la position sociale, qui prime sur tout, les questions religieuses et une moralité presque inexistante, le libertinage et les mœurs sexuelles ainsi que les prémices d'une future révolution.
Tavernier est ambitieux et Que la fête commence... est truffé de détails plus ou moins savoureux, sur le mode de vie de l'époque ou dans les portraits des personnages, où chacun jouera pour son intérêt. Il part d'un contexte historique passionnant (la succession de Louis XIV, le traité d'Utrecht ne permettant pas au roi d'Espagne d'être aussi celui de France...) et se faufile, caméra à l'épaule, au cœur des intrigues et de la vie de l'époque, tant les moments clés que le quotidien (qui en dit parfois bien plus).
C'est dans l'idée de montrer le quotidien de façon réaliste que Tavernier se perd parfois (et sans conséquences), insistant un peu trop et sans subtilité par moment sur la sexualité débridée ou l'ordre religieux qui n'est plus qu'une apparence. Il cherche trop le bon mot ou la bonne phrase, malgré des dialogues souvent de haute volée. Enfin, ça n'empêche pas le film d'être réussi, bénéficiant d'ailleurs d'un superbe cadre naturel et de décors à la hauteur des ambitions du cinéaste.
Que la fête commence... permet à Bertrand Tavernier de se faufiler dans la vie du Duc d'Orléans, qui assure alors la Régence après la mort de Louis XIV, et de poser sa caméra au cœur d'une cour rythmée par le complot, le libertinage ainsi que des manipulations en tout genre.