D'un côté, Destiny (Constance Wu), jeune novice/ingénue qui fait ses débuts dans l'univers du strip-tease et dont "Queens" se sert du quotidien pour nous introduire au sein de ce monde nocturne gouverné par les regards libidineux masculins. De l'autre, Ramona (Jennifer Lopez), reine/experte de la ruche où Destiny travaille et qui attire les billets verts des clients comme des aimants à chacune de ses représentations. Évidemment, la deuxième va prendre la première sous son aile -enfin, en l'occurrence, sa fourrure- et va lui inculquer les règles à suivre pour un maximum de rentabilité. C'est le début d'une amitié sincère, emprunte d'une belle et nécessaire solidarité entre les deux femmes et, plus largement, au sein du groupe de danseuses du club.
Seul souci, ces événements arrivent juste avant la crise financière de 2008 qui va soudainement vider le bar où elles travaillent de leurs clients et leur faire envisager à toutes un nouveau plan de carrière (avouons que l'on n'avait pas forcément pensé à une telle répercussion de la crise sur ce domaine professionnel).
Quelques années plus tard, dans ce milieu qui a dévié vers des extrémités plus sordides, les deux femmes se retrouvent et décident de mettre à profit leurs expériences pour arnaquer des clients riches...


Succès surprise aux USA et inspiré d'un fait divers qui a défrayé la chronique, "Queens" marque surtout le retour flamboyant d'une Jennifer Lopez que l'on croyait perdue dans une série de navetons improbables. Dans le rôle de Ramona, la star revient enfin à son meilleur niveau, complètement investie à la fois physiquement (et c'est un euphémisme, elle a de quoi donner des complexes à toutes les cinquantenaires !) et en termes de présence magnétisante parfaite pour incarner un tel personnage dominant. À ses côtés, Constance Wu confirme tout le bien que l'on pensait d'elle (elle était à peu près la seule chose à sauver de "Crazy Rich Asians") dans une prestation d'abord volontairement effacée devant l'aura de sa collègue, puis amenée à s'affirmer à égalité avec elle dans la spirale de leurs arnaques. Judicieusement, la réalisatrice Lorene Scafaria ("Jusqu'à ce que la fin du monde nous sépare") fait de cette relation le cœur battant de "Queens" qui va conférer un incontestable supplément d'âme à cette odyssée criminelle somme toute des plus ordinaires. En effet, si l'on excepte le milieu du strip-tease et les agissements hors-la-loi spécifiques qu'il va induire, "Queens" ne raconte ni plus ni moins qu'une énième ascension dans l'illégalité jusqu'à une euphorie illusoire et synonyme d'une chute inévitable. Certes, il le fait de manière efficace, surtout dans la montée en puissance des événements et pour créer un attachement vis-à-vis de sa bande de personnages (Keke Palmer et Lily Reinhart ne sont pas en reste), mais il ne prend jamais le risque de dévier d'un chemin que l'on sait linéaire par avance, une impression d'ailleurs renforcée par l'utilisation beaucoup trop attendue de flashforwards faisant de Destiny la narratrice de toute cette histoire face à une journaliste (Julia Stiles, hélas inutile) et ne gardant de fait que peu de secrets sur l'issue de l'ensemble (la dernière partie du film y perdra d'ailleurs beaucoup en intérêt). Enfin, lorsque "Queens" tentera d'étoffer son discours en faisant de ces héroïnes des sortes de justicières vengeresses vis-à-vis des responsables de la crise de 2008 ou qu'il s'essaiera à des angles plus profonds métaphoriquement, on ne pourra pas dire qu'il se montre très convaincant faute de subtilité : dans le premier cas, les personnages auront l'air eux-mêmes de ne pas croire au rôle que le film veut leur donner (cette motivation/prétexte est balancée au détour d'un dialogue comme une paillette sur la soupe) et, dans le deuxième, par exemple, l'analogie pourtant bien pensée du parcours avec un certain cauchemar aurait dû en rester à l'évocation plutôt que d'être représentée un peu bêtement.


Bref, malgré un déroulement des plus classiques et sans réelle surprise, "Queens" sait donc faire la part belle à ses héroïnes hautes en couleur (et aux numéros des actrices principales qui les incarnent), et ce sans jamais oublier de mettre en relief la force du lien qui les unit. Pas de doute, ce sont bien elles les reines de coeur d'un film sympathique à défaut d'être mémorable.

RedArrow
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le 16 oct. 2019

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