Longtemps hermétique, on a du mal à suivre ces pérégrinations dans un monde obscur, gelé, sur-gelé, où les cadavres n'ont pas le temps de pourrir que les chiens viennent sucer les glaçons de sang et de chair très fraîche. Surtout, le post-apocalyptisme semble étonnament faire bonne compagnie à une engeance ludophile. Les hommes et femmes passent leur temps à jouer à un jeu bizarre, le quintet. Un personnage (Fernando Rey) tourne autour des tables, en juge, en interprète des règles du jeu et parait régner sur ce monde de joueurs (Vittorio Gassmann, Bibi Andersson entre autres).
Comme un chien dans un jeu de quilles, un chasseur de phoques (Paul Newman) revient dans cette ancienne cité, accompagnée de sa femme enceinte (Brigitte Fossey). Il est accueilli par son frère, un des joueurs. Toute sa famille périt dans une explosion. Il mène alors l'enquête pour retrouver les assassins. Il va découvrir un jeu, léthal, morbide et cynique, porté par une philosophie post-eschatologique où le carpe diem se marie avec le memento mori. Quelque pensée obscure et dégradée qui fait de la recherche d'adrénaline le seul sens de la vie.
La mise en scène d'Altman est très sereine. Les images et le rythme sont lents, posés, prompts à donner à penser plus qu'à émouvoir. Les scènes de meurtres ne sont pas spectaculaires. On les évite autant que faire se peut. J'ai plutôt été contrarié par le parti pris de flouter les contours de l'image pour signifier les basses températures. C'est vite lassant et enlaidit l'image quelque peu.
Les dialogues sont par moments savoureux. Mais le plus du film est forcément son casting. Vittorio Gassman emporte tout sur son passage. Piacere.