Entre couleurs chatoyantes et teintes mordorées, Kurosawa nous promène à travers de sublimes tableaux magnifiquement composés. Derrière chaque plan, on devine chacun des dessins du story board peint par Kurosawa lui-même.
Ran, c’est une histoire familiale de rivalité, de vengeance et de haine : trois frères, trois flèches, la volonté d’unité d’un père et le chaos.
Une histoire où un homme insiste impuissant à la rivalité de ses fils. Une histoire de forteresses qui symbolisent à merveille les défenses intérieures que se construisent les humains et qui se reflètent dans les murs de pierre où viennent se fracasser les violences internes.
Le XVIe siècle japonais est magnifiquement mis en scène. L’intensité des émotions est montrée autant par les postures hiératiques que par les scènes d’action. La séquence de guerre au milieu du film m’évoque une hémorragie, comme un corps qui perd son sang, sa vie tandis que les guerriers sortent en flot ininterrompu et se heurtent dans un brasier de flamme.
Inspiré de la pièce de Shakespeare : Le Roi Lear, Kurosawa raconte cette histoire magistralement comme il sait le faire. Si la violence et la fureur se déchaînent, la bonté et les qualités de cœur sont présentes également, et le père les découvre là où il ne s’y attend pas. Cet homme ouvre peu à peu les yeux sur sa propre vie et les conséquences de ses actes, de quoi sombrer dans la folie. Ce chaos ne vient pas de nulle part. La violence naît de la violence.
Ran est une œuvre sombre, grandiose. Alors qu’il approche de la fin de sa carrière, le grand Kurosawa sait toujours nous enchanter et nous entraîner dans son univers.
Maintenant je me souviens, j’avais trois fils …