Ran est un film tout simplement brillant.
Kurosawa s'appuie sur différentes sources, adaptant le Roi Lear de Shakespeare tout en le croisant avec de vieu mythe japonais pour nous offrir ce chef d'oeuvre qui traduit toute sa maîtrise du cinéma.
Déjà, la photographie de ce film est absolument incroyable. Le film joue beaucoup sur les couleurs primaires, ce qui donne au film un aspect très vif, saisisant, notamment dans les scènes où elles tranches sur des fonds plus macabres, sombres (je pense notament à l'excellente séquence de l'enfer). C'est par ailleurs une photographie hyper picturale, avec pas mal de plan qui sont pensé et réalisé comme des tableaux, avec beaucoup de clair obscur, de fixité.
On doit aussi cette fixité au rythme que Kurosawa choisi de donner au film. On a beaucoup de plan qui investissent la durée, l'immobilité, qui nous laissent le temps de saisir le détail, de s'imprégner de l'ambiance à la fois délétère et glaçante qui s'installe peu à peu. Néanmoins, on a aussi des séquences plus dynamiques, qui offrent beaucoup de mouvement, avec des plans moins long et plus animés, ce qui vient remettre de l'élan surtout lors des chevauchés. Ce contraste permet surtout de mieux saisir la tension politique et fraternelle mais aussi les errement du père.
À ce ryhtme double se surrimpose le même principe au sujet du découpage de l'espace. On alterne entre des grandes plaines qui évoquent autant la liberté que la possibilité de se perdre et des intérieurs propices au surcadrage des personnages qui sont tantôt synonyme d'intimité, tantôt synonyme d'un enfermement, d'une situation inextricable. Dans les deux cas, l'abondance de disposition géométrique, plus ou moins rigide, plus ou moins organique, nous invite à penser l'occupation de l'espèce selon ces deux angles selon la façon dont ils se renforcent ou s'opposent d'une scène à l'autre ; cela se traduit notament par la disposition des personnages.
Ces personnage sont d'ailleurs éminement théâtralisée, on sent bien ici toute l'influence du théâtre Nô (et l'adaptation du Roi Lear) : la gestuelle est très marqué, les visages très expressifs, les personnages font régulièrement des apartés et tirade, l'intrigue est marquée par des figures très emblématiques (le fou peut être rapproché d'un valet de théâtre par exemple) et des "coups de théâtre" à proprement parlé. Pour autant cette forme de ritualité semble toute naturelle dans le contexte du japon féodal dans lequel Kurosawa place son histoire, ce qui permet de lier le tout dans une grande harmonie.
Par ailleurs, il faut noter à quel point le son est bien travailler, avec des grands moments de silence dramatique, une place faite aux bruits de la nature comme à ceux de la guerre mais aussi une BO qui vient accompagner des moments clés, créant parfois des contrastes saisissant et d'un lyrisme extrêmement sombre. Tout est mener avec une grande précision ici encore.
En bref : Ran est un film qui touche au génie et tout le monde devrait voir ça au moins une fois dans sa vie.