Préfigurant la vague des films Category 3

Rape and Die, c’est une plongée au cœur d’une jeunesse désœuvrée des quartiers défavorisés du Hong Kong eigthies. Les ruelles y sont sombres et lugubres, sans espoir. Lee Wing-Cheung propose une peinture urbaine désenchantée, où une part de la jeunesse semble désespérément abandonnée. Livrée à elle-même, cette jeunesse se fourvoie dans la prostitution, la drogue et la folie. Les thèmes abordés y sont forts et décontenançant. A travers son actrice vivant un passage de l’adolescence à une condition d’adulte, – le fait qu’elle devienne femme mais avec un corps adolescent – l’auteur traite de la cellule familiale éclatée (une mère prostituée, un père non-présent), du viol et de l’avortement clandestin. Les sujets se bousculent au milieu de cette jeunesse à l’abandon et sans repère. On y suit leur détresse au sein de la violence : les règlements de compte et la criminalité. Même le cocon scolaire est en perdition et accouche de déscolarisation prématurée. Tout est donc obscur.


Dès l’ouverture, Rape and Die nous jette dans le bain. On comprend très vite que cette jeunesse perdue est abandonnée comme ces bébés dans les ruelles, et les adultes dépeints n’apportent rien de bon au milieu de ces cris de souffrances étouffés. Condamnée à survivre, Ah Feng adopte un style de vie déviant et dangereux, où même une relation qu’on pourrait qualifier de romance avec le personnage de Ray Lui est une maigre échappatoire. Tout semble éphémère voire illusoire, rappelant ainsi la relation amoureuse de l’une des amies d’Ah Feng. Lee Wing-Cheung livre donc des situations pessimistes. Il fait alors appel à une mise en scène maîtrisée qui marque par la force des images. D’ailleurs, Rape and Die mériterait une remasterisation pour profiter du travail sur la photographie. Il s’en dégage une ambiance poisseuse et terrifique. Et les quelques élans de films d’exploitations renforcent l’aspect désespéré de l’œuvre qui prend une dimension autre. Rape and Die s’affiche alors comme une œuvre bâtarde et unique.


Rape and Die est une œuvre réussie qui d’un postulat de drame social vire rapidement aux effusions exploitationnistes, notamment le rape and revenge. Une œuvre dérangeante.


(voir peloche et + : https://hongkongmovievideoclub.wordpress.com/2013/09/18/rape-and-die-1983-cheung-kwok-kuen-avis-review/)

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le 14 nov. 2013

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