Violence d'un monde construit sur les apparences
Tout d'abord, après avoir lu les critiques de certains spectateurs je suis assez étonné que certains mettent ce très bon film au niveau d'un téléfilm ou d'une série B! Premièrement une excellente mise en scène de Lucas Belvaux, certes classique, mais très intelligente, du niveau des thrillers sociologiques des 70's en plus esthétisant (Costa-Gavras, Yves Boisset, voir Alain Corneau pour ses policiers). Deuxièmement un scénario extrêmement bien écrit et charpenté, malgré une certaine lenteur au milieu du film. Plus que le côté thriller, c'est l'étude sociologique du milieu des affaires et de la bourgeoisie qui d'emblée s'avère forte: les réactions des collaborateurs, des actionnaires, du milieu politique et du milieu familial de Graff (Yvan Attal) dès la demande de rançon puis surtout après l'enquête sur sa vie en dehors du cercle familial révèlent un milieu bourgeois et de pouvoir froid et indifférent, surtout soucieux de sauvegarder ses intérêts et l'image écornée par l'enlèvement et la vie privée "dissolue" de Graff. Mais c'est dans la seconde partie du film, après la libération que les masques tombent vraiment: Graff est seul, sans soutien de sa famille après sa terrible épreuve - la tirade de Françoise (joué avec tout le détachement égoïste que demande le rôle par Anne Consigny) son épouse, qui parle de sa souffrance due aux conséquences des révélations et de l'enlèvement sans tenir compte de l'enfer vécu par son mari, est d'une monstruosité sans nom-. Puis la descente aux enfers, violente, s'intensifie: poussé à la porte par son fidèle bras droit (André Marcon, froid, ambitieux et manipulateur jouant à merveille la fausse loyauté à l'égard de son "président" et de son entourage) et même la justice met en doute sa probité... La seule affection qu'il trouve c'est celle de son chien! Une dénonciation virulente d'un milieu bourgeois et des milieux des affaires sans émotions et sans humanité face à la souffrance psychologique d'un homme que l'on a dû jalousé et que l'on souhaite voir à terre, complètement achevé pour lui faire payer sa vie de pouvoir et ses avantages...Finalement son milieu social ne vaux pas mieux que ses ravisseurs! Troisièmement, une interprétation impressionnante d'Yvan Attal, son meilleur rôle ? Certainement! Sa nomination aux Césars pour ce film n'est que justice et proportionnelle à son implication bluffante dans ce rôle difficile... Film à découvrir