Ready Player One c'est 2 questions qui reviennent en boucle:
Est-ce un bon Spielberg?
Est-ce un bon film sur les jeux?
Pour la première, je ne suis pas assez qualifié pour y répondre. Par contre pour ce qui est de la seconde, Ready Player One a eu le malheur de me cracher au visage pendant 2h. Il se trouve que je suis game designer de métier et le petit gars ou la petite dame qui a écrit le livre original devait avoir une compréhension très limitée de notre travail. Lorsque le designer du jeu en désaccord avec son collègue s'exclame au bout de 30 minutes de film "je n'aime pas mettre des règles, je préférais quand cela n'était qu'un jeu" j'ai dû retenir une belle tranche de rigolade qui pointait dans le fond de ma gorge. Cher Monsieur Bidule, c'est votre métier de mettre des règles. En vous enlevant ça, j'ai bien peur qu'il vous reste autant de possibilités qu'un peintre qui ne veut pas mettre de traits sur une toile ou qu'un écrivain qui refuse d'écrire des lettres. Il vous faut vous mettre à la poterie ou écrire des livres comme la personne qui vous a créé, si vous ne voulez pas mettre de règles.
Alors on pourrait me reprocher d'être un peu tatillon dans le jugement d'un film à la lumière d'une seule phrase. Seulement cette phrase est le socle sur lequel repose toute l'univers du film. Tout est pensé avec cette conception complètement pétée du fonctionnement d'un jeu. A moins que cela ne serve l'intrigue, il n'y a aucune règle réellement consistante qui régit l'OASIS. Le fonctionnement du monde change à la volée malgré un créateur qui bouffe les pissenlits par la racine depuis plusieurs années. Plus personne ne contrôle rien ou tout le monde contrôle tout, on est pas sûr de grand chose. Une confusion qui rend l'univers bancal malgré tous les efforts de la réalisation pour en tirer le meilleur.
Si on peut être content que ces dernières années le cinéma nous gratifie enfin de films réalisés par des joueurs, ce n'est pour ma part déjà plus suffisant pour déclencher mon indulgence. J'attends plus d'une histoire construite autour du rapport d'un créateur de jeu à son oeuvre qu'un ramassis de fantasmes de joueurs accumulant toutes les bêtises que l'on entend sur la réalité virtuelle depuis 30 ans. Une référence aux années 80 de plus dont on aurait aisément pu se passer.