De Kiyoshi Kurosawa, je n'ai vu que 3 films que j'ai beaucoup aimés : Cure, Kairo et Séance. J'y avais en effet apprécié un sens du cadre évident, générateur de belles ambiances, souvent glauques et désertiques. Ainsi, de Real, j'attendais au moins une mise en scène inspirée sur laquelle se grefferait un développement narratif à la hauteur de l'ambition du sujet abordé. En effet, traiter de l'imaginaire, du réel et surtout de l'irréel, à travers le retour d'un état comateux a de quoi éveiller toute curiosité.
Malheureusement, jamais Kiyoshi Kurosawa ne parvient à faire quelque chose de cohérent de ce sujet retors. Real semble être resté à l'état de brouillon, traversé par des milliers idées qui ne parviennent pas à trouver leur harmonie. On commence par un petit soupçon de science fiction, on continue avec un bel univers onirique et enfin on retombe dans une réalité morose qui ôte au film tout son potentiel. En effet Kiyoshi Kurosawa n'est jamais aussi à l'aise que lorsqu'il film l'irréel, au moyen duquel il peut, par la force des symboliques, se jouer de l'esprit humain tout en le disséquant. C'est pourquoi, toute la première partie de Real parvient à intéresser, elle est en effet dépourvue de frontières et navigue allègrement dans une dimension où tout est possible jusqu'à la matérialisation dans le réel de nos pensées les plus profondes.
Mais dès que le cinéaste décide de renouer avec la réalité pour nous expliquer, en détails, ce qu'on aurait pu ne pas comprendre jusqu'ici, toute la belle magie du sujet fait d'imaginaire s'évapore. Et c'est parti pour un tête à tête avec un ennui profond qui ne nous quittera plus. C'était à mon sens la mauvaise idée du film, de vouloir rendre palpable tous les concepts qui n'étaient jusque là qu'énoncés. Au lieu de continuer son voyage onirique, Kiyoshi Kurosawa nous la joue petit malin avec un twist peu inspiré, annonçant une quête initiatique nécessaire aux protagonistes pour trouver un chemin vers leur réalité. Le réalisateur y perd totalement pied, il ne parvient plus à trouver son rythme et étire ses séquences plus que de raison. Quelques fulgurances, toute cette mythologie portée par le dino par exemple, parviennent à se faire une place dans cette dernière partie insipide, sans réussir toutefois à la sauver.
Real n'est pas un mauvais film, Kiyoshi Kurosawa y fait preuve d'une belle générosité, ses intentions sont louables et de chaque séquence transpire une volonté de donner. Mais il se perd dans son propos trop ambitieux et ne parvient pas à faire de ses idées un objet filmique homogène. Pire, on le sent perdu entre des effets spéciaux grossiers, des cadres parfois balbutiants, des choix photographiques assez discutables (les images sont glacées, sans aucune vie, très brutes de décoffrage) et une direction d'acteurs un peu fébrile (mention spéciale au corps médical).
Au final, il ne reste pas grand chose à se mettre sous la dent, si ce n'est ce postulat de départ plein de promesses et une belle générosité à l'écran, qui malheureusement ne paie pas souvent. Grosse déception.