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Red Dog n'est ni le blockbuster de l'été, ni un film d'auteur au twist à vous lécher les bourses ou vous gratter le cul par terre. Non, Red Dog est une petite comédie au grand cœur et au scénario...
le 11 déc. 2015
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Red Dog est basé sur une histoire vraie, une de ses innombrables histoires locales qui s'agglomèrent les unes aux autres et qui finissent, au delà du folklore, par offrir à l'Australie ses mythes. Ce sont ces récits qui construisent, morceau par morceau, une identité à un pays qui manque cruellement d'ancrage historique. Ce qui est le plus étonnant ici, c'est qu'il ne s'agit pas cette fois ci du récit d'un pionnier, d'une pionnière, d'un groupe de mineurs, de marins ou d'un type conduisant son troupeau à travers le désert, c'est celui d'un clébard, aujourd'hui devenu symbole du Pilbara, une vaste région au nord ouest de l'Australie.
Red Dog est donc l'histoire d'un chien né, on le pense, en 1971. On ne sait pas grand chose de son histoire avant que son premier propriétaire ne le ramène avec lui à Dampier, alors qu'il était encore très jeune. A l'époque, Dampier, dans la région du Pilbara (nord ouest de l'australie) c'est une sorte de petit village de pêche qui se développe à toute vitesse sous l'impulsion d'une gigantesque mine de fer qui vient de s'ouvrir à côté... Bien que le premier nom du chien fut Tally Ho, il fut vite surnommé "Red Dog" à cause de sa dégaine écarlate, due à la poussière rouge qui colore tout le pays, et tous ses habitants...
A Dampier, les mois passent et Red Dog qui développe un caractère farouchement indépendant, n'est pas du genre à avoir un maitre. Du coup, il traîne avec tout le monde, et il n'appartient à personne. Il passe le plus clair de son temps à vagabonder sur les différentes zones du port industriel passe des journées entières à pioncer dans les ateliers fureter dans les ateliers de la mine... Un jour, la route du chien croise celle de John, un chauffeur de bus, et Red Dog qui n'avait jamais eu de maitre décide que ce John sera le sien. John Stazzonelli va alors trimballer le chien partout où son bus le conduira, sillonnant l'ouest du pays, de Perth à Broome... L'amitié entre John et Red Dog va durer quelques années jusqu'à ce qu'en 1975 le chauffeur de bus soit tué à la sortie de Dampier dans un accident de moto
A partir de ce jour, par goût du voyage ou dans une tentative désespérée pour retrouver son maitre, le chien va prendre la route et errer sans fin sur les routes de la région, hériterant d'un nouveau surnom, "The Pilbara Wanderer"...
Le chien a appris à faire du stop, il passe alors d'un gars à l'autre, d'une voiture à l'autre ou voyage en camion. Il s'en va de plus en plus loin à chaque fois... Mais toujours, le chien finit par revenir à Dampier
Connu de tous, reconnu et protégé par tout le monde, Red Dog devient le chien de toute une communauté. Il jouit de nombreux avantages, va où il veut et est traité avec tous les égards. Il est également soigné gratuitement par un vétérinaire de Karratha, la cité dortoir batie à coté de Dampier pour loger les mineurs. Bref, Red Dog est une star. Les récits de ses voyages, les gens qui jurent avoir vu le chien ici ou là, les légendes comme celle qui prétend que le chien aurait embarqué sur un cargo et a été vu dans un port japonais, tout ça s'accumule jusqu'en 1979, un appât à la strychnine mette fin à la longue errance de Red Dog. Après une longue lutte contre le poison, le chien est finalement euthanasié et le vétérinaire qui l'avait soigné toutes ces années va l'enterrer dans un lieu secret.
Bien sûr, la vie de ce chien fut d'abord une histoire orale. Toute la région de Dampier, Karratha, Roeburne, s'échangeait des fragments du récit, jusqu'à ce qu'au début des années 80 une autrice australienne, Nancy Gillepsie, commence à tout recueillir pour en faire un livre. C'est un recueil de témoignages, d'histoires et de poèmes écrits par les gens qui ont connu Red Dog. En 1993, un second livre est publié puis un troisième, un peu plus tard.
Quelques années après la mort du chien, un collectif se forme et finance une statue en l'honneur du cabot. Cette statue va être installée à l'entrée de la ville et scelle l'identité du patelin. Aujourd'hui, l'office du tourisme et les magasins locaux sont tous remplis de souvenirs à l'effigie du chien... Tshirts, casquettes, decapsuleurs, cartes postales, boules à neige etc etc... les touristes viennent parfois de loin pour voir la statue de Red Dog.
Bien sûr, tout ça ne pouvait que motiver une industrie cinématographique toujours avide d'exploiter les curiosités locales et les histoires poignantes si bien qu'en 2011, un film est finalement tourné. Dès le début, l'approche est très familiale et les auteurs vont chercher à exploiter au maximum la dimension mélodramatique de cette histoire. Mais si les torrents de larme sont garantis, le film peine cependant a vraiment convaincre...
Si techniquement, le film est globalement correct, se reposant sur un cast sympathique et jouissant d'une photo agréable, le manque de moyen peine à faire sortir "Red Dog le film" d'une succession de décors assez étriqués, trahissant l'échec évident de la tentative de reconstitution d'un lieu et d'une époque. Le Dampier des années 2000 n'ayant plus rien à voir avec celui des années 70, et la production n'ayant trouvé que peu d'astuces pour contourner ce problème, le recours à des décors limités et anonymes nuit à l'ambiance générale que le film appelait pour retranscrire le monde qu'il se propose de décrire.
C'est également dommage que l'approche très, et sûrement trop, "Disney" du sujet fasse l'impasse d'une étude ou d'une description plus poussée et plus sérieuse des personnages. Une galerie de types venus se perdre (ou se faire oublier) dans l'une des régions les plus reculées et les plus oubliées de l'Australie pour travailler dans une mine de fer, sous un soleil infernal, face à une mer hostile, hantée par les requins et les crocodiles. Il y a là un sujet fascinant que le film effleure parfois, au détour d'une voix off présentant les protagonistes, ou à la fin lorsque ces derniers entonnent ensemble une chanson en hommage à ces mineurs, mais délaisse le reste du temps comme s'il s'agissait de ne pas parasiter la "légereté familiale" du projet avec des considérations peut être trop déprimantes, ou violentes...
Du coup, l'échec du film qui peine à n'être rien d'autre qu'une comédie familiale un peu médiocre et sans trop d'ambition, fait clairement regretter que les auteurs n'aient pas cherché un autre angle en s'engageant bien plus en avant dans cette tradition de films australiens qui décrivaient les moeurs et le quotidien de ces mecs perdus à faire des boulots hardcore dans des zones inhospitalières (Wake in Fright, Sunday too far away ou The Last of the Knucklemen). Le choix d'un virage comique assez lourd (l'arc narratif avec le chat, consternant dans le fond et dans la forme) s'explique peut être par cette ambition familiale, mais c'est clairement aux dépends de l'histoire.
Un dernier mot sur Koko qui interprète "Red Dog". Il s'agit d'un jeune kelpie qui fournit ici une prestation incroyable. Admirablement dressé, le chien fournit une palette d'émotions variées tout à fait surprenantes, d'une subtilité et d'une finesse que pourrait envier un type comme Ryan Gosling. Le choix d'avoir fait confiance à la prestation du chien est une idée géniale et le plus gros tour de force du film. On souhaite donc bonne chance à Andy Serkis pour arriver à créer une telle émotion s'il était engagé pour jouer l'animal dans un potentiel remake américain... A sa sortie, le film fut un succès énorme, et bien sûr, Koko devint immédiatement une star. Malheureusement, l'animal devait décéder dans les mois qui suivirent, injustement fauché en pleine gloire, restant aux yeux du public australien comme une sorte de James Dean canin. Rien que pour sa performance, le film doit être vu.
Créée
le 21 mars 2022
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