Resistance du jeune réalisateur vénézuélien Jonathan Jakubowicz convoque la grande et la petite histoire à travers la jeunesse de Marcel Mangel qui deviendra par la suite le mime Marcel Marceau à la renommée internationale. Mais avant d'être artiste l'homme sera aussi dans les tourments de la seconde guerre mondiale , un résistant et un juste qui aidera et sauvera de nombreux enfants orphelins, dont les parents ont été tués par les nazis. Resistance fait parti de ses films dont la puissance du sujet ne saurait souffrir de la moindre tiédeur , mais aussi de ses grandes histoires qui invitent aux indulgences critiques tant il est parfois difficile de dissocier l'objet artistique de son contenu lui même.


Entre le biopic et le film de guerre, Resistance porte donc un regard sur la jeunesse de Marcel Marceau alors petit artiste de cabaret qui sous l'impulsion de son frère Simon et de son cousin se lance dans la résistance à Lyon avant de se consacrer à la protection et au sauvetage d'enfants orphelins qu'il aide à passer en Suisse.


Resistance est une grosse déception qui ne parvient jamais à m'embarquer dans son propos ni dans l'émotion intrinsèque à son lourd sujet. Je ne pense pas avoir l'insensibilité des cœurs de pierre mais j'attends de certains films qu'il me bouleverse là ou ils ne font que me toucher, qu'il me passionne là ou il ne font que m'intéresser et qu'il me heurte et m'angoisse là ou ils ne font que me piquer dans mon confort de spectateur. De part son sujet d'un artiste de pantomime confronté avec des enfants à l'horreur de la guerre, j'attendais du film plus de fantaisie, plus de poésie et une approche parfois plus symbolique d'une triste réalité sublimé par la magie d'un artiste. Resistance ne va jamais vraiment dans cette direction comme plombé au sol par la lourdeur de son sujet, le film reste terre à terre et ne s'envole jamais là ou la poésie finit par faire la nique à l'horreur. Malheureusement dans sa description plus froide et réaliste de la guerre et de la résistance le film de Jonathan Jakubowicz semble là encore hésité entre le réalisme cru et la reconstitution un peu factice d'une époque qui ressemble bien plus ici à un décor hollywoodien qu'aux sombres et nocturnes ambiances de L'Armée des Ombres. Moi qui voulait un vertigineux ascenseur émotionnel , jamais la poésie ne me fait décoller, pas plus d'ailleurs que l'émotion ne remet les violement les pieds dans la boue. Il y-a dans Resistance ce sentiment permanent d'entre deux choses, d'un film qui n'arrive jamais à véritablement embrasser ses enjeux dramatiques et ses capacités de respirations plus légères et poétiques. Resistance est pour moi un film bien trop sage, bien trop propre, bien trop lisse et trop engoncé sous le lourd fardeau de l'histoire pour vraiment s'émanciper en tant que proposition artistique. Jamais le film (et non l'histoire) ne parvient à me toucher ni vraiment m'émouvoir alors que j'attends à minima tout l'inverse de ce genre de film .


Si Jesse Eisenberg est plutôt convaincant sans être extraordinaire dans le rôle de Marcel Marceau, le casting féminin se taille la part du lion avec la douceur et l'émotion de **Clémence Poésie** et surtout la confirmation du charisme et du talent de la jeune Bella Ramsey dont on avait déjà pu apprécier la prestance en Lyanna Mormont dans Game of Thrones. Le reste du casting international n'est pas mauvais mais peu de personnages ont finalement vraiment le temps d'exister à l'écran que ce soit Felix Moati, Edgar Ramirez ou l'immense Ed Harris. Quant à la mise en scène de Jonathan Jakubowicz elle me semble bien scolaire et impersonnelle loin des flamboyances qui font les grandes épopées humaines et loin de la discrétion de ses grands réalisateur capable de s'effacer pour laisser vivre et respirer la puissance de leur sujet. Pour ne citer que la scène du train que visiblement pas mal de monde trouve extraordinaire et anxiogène, je la trouve certes tendue mais aussi assez artificielle dans sa construction et ses enjeux symbolisant à elle seule tous les paradoxes du film en entier.


Resistance reste un joli film, plutôt bien maitrisé, plutôt bien construit, pas mal interprété et parfois touchant. Ce sera sans doute suffisant pour beaucoup de gens mais pas pour moi. Il y-a des films et des sujets dont j'attends qu'il me glace les sangs ou qu'il m'emporte très haut là ou la chaleur de leur douce poésie devient moteur d'émotions propre à vous foutre les larmes au yeux. Tout sauf la tiédeur confortable d'un spectacle académique et sans grands suppléments d'âme.

freddyK
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le 27 nov. 2020

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