Quel sacré plaisir de voir que le film Noir n'est pas mort ! Pourtant de la plupart des intervenants à la réalisation et à l'écriture rien ne laissait présager quelque chose qui parte dans ce sens, David Ren, le réalisateur, n'ayant jusqu'ici que signé Shanghai Kiss, une comédie romantique. On retrouve certes la romance ici aussi, mais davantage dans l'esprit de The Hard Goodbye, premier volume de Sin City, sans pour autant que le métrage ne soit un simple copier/coller. On a une prostituée tuée, un bad guy (ou good guy, à vous de voir) qui veut la venger à tout prix, sauf qu'il n'était pas un client, mais le « driver », celui qui l'emmenait à ses rendez-vous et s'assurait que tout se passe bien, et dans le cas contraire sortait les poings.
C'est simple, à l'intrigue sans grands rebondissements, et contrairement au récent El Gringo, l'écriture rend le tout fluide, le spectateur n'ayant pas une impression de néant dès que la castagne arrête. D'ailleurs question castagne nous sommes très largement servis, Jason Yee, interprétant le héros, s'affichant dans un rôle où il peut enfin nous faire profiter de ses talents, de façon efficace, contrairement aux multiples films de seconde zones dans lesquels il a précédemment tourné. Qui plus est les plus aficionados du monde des arts martiaux auront vite fait de jubiler en voyant que l'un de ses adversaires dans la pellicule est Lateef Crowder, incroyable spécialiste du genre, que ça soit dans la série Mortal Kombat, The Expendables ou encore Sucker Punch; il n'y a d'ailleurs que lui pour réussir à faire de la capoeira dans un couloir exiguë, réellement impressionnant. Et puis ce couloir est également l'occasion pour le réalisateur de nous servir une belle baston contre des vigiles, reprenant le principe de celle de Old Boy. Ok l'emprunt est facile, mais ça reste bien trop jouissif pour que l'on puisse pinailler, et puis à la base le concept vient des jeux-vidéo et leur side-scrolling...
Rien à redire côté action, pieds, poings et balles assurant le spectacle. La réalisation, le montage, tout suit globalement bien, le film étant entièrement tourné de nuit, rappelant encore une fois Sin City, mais également The Crow, ainsi que tous les films Noir et comics du genre. Ça n'est d'ailleurs pas un hasard si la bobine commence sur une pochette de comic et finit sur celle-ci. Heureusement aucun effet n'est présent dans le film, ce qui est réellement bienvenu, car le trailer en affichait, et vu le résultat dans El Gringo, on aurait pu craindre le pire. Un certain sérieux est donc conservé et l'on évite de se barrer dans le grinhouse agrémenté de compositing idiot, ce qui est un bon choix, car le film en a suffisamment dans le bide pour que l'on s'en souvienne. Le visuel est a fortiori très aguicheur, surtout pour un film d'à peine plus d'1 million de dollars, avec des décors riches et souvent renouvelés, des matte-paintings réussis, ainsi qu'une photographie très satisfaisante, bien que lors de certains rares moments le grain soit un peu trop prononcé.
Revenge City (que l'on aurait préféré voir sortir avec son nom d'origine, « The Girl From The Naked Eye ») se classe donc parmi les meilleurs DTV sortis en 2012. Tout est là, une bonne histoire, un héros attachant, une écriture bien huilée, ainsi qu'une bonne mise en scène, de l'action menée tambour bâtant, ainsi qu'une poignée de flashbacks nous éclairant sur le personnage et sa relation avec la victime qu'il veut venger, toujours placé de façon judicieuse, sans casser le rythme comme c'était affreusement le cas avec Bitch Slap. Un actioner mélangeant parfaitement film Noir et arts martiaux sans virer au nanar, c'est assez rare pour ne pas passer à côté, voire en faire un produit indispensable.