On la connaît par cœur, cette histoire-là, celle du retour parmi les siens, sur les terres natales après des années d’absence. Souvent, c’est parce que la mère est malade, ou le père, ou alors quelqu’un est mort. Souvent, il y a de vieilles rancœurs qui traînent, pas résolues. Souvent, il y a une sœur ou un frère qui est resté(e) et pour qui c’est pas rose, avec rien qui avance. Au départ, Jessica Palud voulait adapter le roman de Serge Joncour, L’amour sans le faire, en gardant en tête ce récit d’un homme revenant dans la ferme de ses parents pour leur annoncer qu’il allait mourir (un truc au cœur), et qui rencontrait la femme et le petit garçon de son frère tué dans un accident de chasse.


Sauf qu’entre-temps, Juste la fin du monde de Xavier Dolan est sorti. Pratiquement la même chose : Louis revient dans sa famille pour dire qu’il ne sera plus là. Alors Palud change la donne, réécrit son scénario. C’est la mère qui va mourir, et il y a chamaillerie avec le père. Pour le reste, on garde à peu près les mêmes choses. Mais davantage qu’une mort annoncée, que des retrouvailles impossibles ou qu’une famille à reconstruire, Revenir est une rencontre. Celle entre Thomas, le fils qui a fui loin (au Canada) pour ne pas être obligé de revenir tous les quatre matins, et Mona et son gamin (dont Thomas deviendra un repère, un nouveau papa), comme abandonnés dans cette ferme que tout le monde a déserté : les vaches vendues pour payer les dettes, le mari crevé dans les bois, le frère qui s’est fait la malle, la mère qui agonise à l’hôpital et le père qui rumine à ses côtés.


Une rencontre qui va changer les choses, peut-être. Qui va nourrir des occasions, des remises à zéro, des mises au point. Un changement de perspectives. Rien de franchement original a priori, et la trame, c’est vrai, est académique au possible, sent bon ce cinéma français qui aime à se gargariser de drames intimistes, labellisés "nos régions ont du talent". Mais là où Palud réussit plus ou moins son coup, c’est dans son refus de psychologie, de chichi (en 1h15, c’est plié), de glamour (campagne déserte, monde agricole sans pitié, chaleur écrasante, corps en sueur) et de grandes scènes de larmes et d’explications.


Par exemple on ne saura rien des causes du conflit entre Thomas et son père, et la fin préfèrera s’ouvrir à l’incertain : revenir pour repartir, ou revenir pour rester ? Le film va direct à l’os, presque radical, presque sans dialogues, le minimum, plutôt des non-dits, des silences et des regards. Et puis Adèle Exarchopoulos et Niels Schneider magnétisent, même sans être à leur avantage, dégoulinants, pas maquillés, habillés comme des sacs. Pour eux, on pardonne. On pardonne ces quelques maladresses (la scène d’amour dans la boue) et l’impression de déjà vu parce qu’ils bouffent l’écran, et parce qu’ils nous emportent avec eux.


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mymp
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le 5 juin 2020

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