Tout en étant bien au courant des manifestations de 2019-2020 à Hong Kong, éclipsées en grande partie par la pandémie de covid (qui a d'ailleurs servi d'occasion en or pour imposer une couche supplémentaire de répression), j'avais très peu de repères visuels documentant le déroulé des manifestations et de la répression policière. Le documentaire Kiwi Chow est franchement pourvu de gonades conséquentes pour accumuler autant d'images pour retracer le fil de ces événements qui, forcément, d'un œil français, fait énormément penser aux gilets jaunes. Le parallèle est inévitable, à commencer par les conséquences dans les chairs des manifestants — à ce titre le docu présente des images assez violentes.
On peut reprocher plusieurs choses à "Revolution of Our Times" ceci dit : la longueur, un peu excessive et qui dilue pas mal le contenu du discours, l'emploi de certains effets de style (comme la musique) qui sont totalement superflus tant les images captées se suffisent à elles-mêmes, pas la peine de rajouter des violons, et le manque de contextualisation pour un public international, qui en l'état peine à donner les clés de compréhension de la problématique globale. Étape supplémentaire dans la sensation désagréable, l'ingérence typiquement états-unienne dans le bordel, avec grands discours moralisateurs pas du tout intéressés par la nature du conflit avec la Chine, et ces quelques drapeaux comme autant de symboles malaisants.
L'ampleur des manifestations est cependant assez renversante, mobilisant au maximum 2 millions de personnes (selon la police ou les principaux intéressés, on ne le dit pas) sur une région qui en compte 7. Les scènes de guérilla urbaine font de temps en temps preuve d'une intensité toute particulière, et participe à la création du portrait d'une détresse générale poignante, avec son lot de corruptions et de grandes violences (l'épisode de l’attaque de Yuen Long, aussi appelé l’incident 721, est très dur, tout comme les récits de "règles noires" à cause des gaz lacrymos). Un mouvement sans leader, sans organisation centrale, auto-gérée depuis Telegram, dépeint au travers de 7 chapitres remplis de sang, de larmes et de débrouille.