Contacter le syndic pour qu'il fasse passer l'entreprise de dévampirisation SVP

Produit par le japonais T. Shimizu (!), "Rigor Mortis" se veut une relecture particulièrement sombre des "vampire-comedies" hong-kongaises des 80-90s (initiées par "Mr Vampire" de Ricky Lau en 1985), avec une grosse couche méta qui fait tout le sel du film mais qui risque bien d'échapper au spectateur non-averti (le film a le même acteur principal que "Mr Vampire"...qui joue un acteur passé de mode - ancienne star de "films de vampires" - et dépressif!). Par ailleurs, le film nous introduit à un champ esthétique / de croyance qui reste encore assez méconnu par chez nous, soit les rites d'exorcisme taoïstes (même si l'on sent également - cf. les scènes avec les fantômes - une certaine influence de la J-Horror, Shimizu oblige). Bref, le film est particulièrement dépaysant pour un spectateur français lambda et supposera certainement un effort d'acclimatation mentale. Mais franchement, le jeu en vaut la chandelle.

La véritable star ici, ce qui frappe d'entrée, ce sont les décors particulièrement poisseux (pas vu d'ensemble résidentiel aussi flippant / marquant depuis "Dark Water" de H. Nakata), ainsi que l'éclairage et les maquillages/FX qui donnent au film une esthétique vraiment mémorable. Les acteurs ne sont pas en reste et font bien le job (le film se transformant par moment en véritable film de Kung-Fu). Le scénario semble dans un premier temps plutôt bordélique, mais un twist final (je ne spoile rien) viendra redonner une véritable cohérence appréciable à l'ensemble. Le film a été clairement (bien) pensé; on est loin d'un film d'exploitation de bas-étage.

On a donc affaire de mon point de vue à une véritable petite perle horrifique assez méconnue par chez nous (prix du jury à Gérardmer en 2014 tout de même), esthétiquement au-dessus du lot, et qui parvient de façon convaincante à nous fait sortir des cadres (un peu fatigants à la longue car battus et rebattus) de l'horreur américaine ou japonaise. Bon, s'il faut citer un défaut (outre les références à avoir, comme expliqué au début, pour apprécier pleinement le film), précisons que le film ne fait vraiment pas peur; s'il se permet des scènes/effets gores du plus bel effet (avec des décors au diapason), il ne parvient pas - ou n'essaie même pas? - d'instaurer une véritable tension horrifique. On reste dans un régime de monstration/action assez simple, alors que les éléments étaient en place, à mon avis, pour faire quelque chose d'encore plus flippant (surtout avec Shimizu aux manettes derrière, qui s'y connait pourtant comme personne en jump-scares à vous faire sauter de votre siège). Mais que cela ne vous détourne pas d'un film vraiment intéressant, avec de vraies propositions innovantes (ce qui n'est pas donné par les temps qui courent).