En me baladant sur 'senscritique' à propos de ce film, j'ai été assez surpris de constater que je l'avais inclus dans mon top des meilleurs westerns alors que je sais très bien que je ne l'avais jamais vu avant son récent passage à la télé. M'est d'avis que j'avais dû le confondre sur le coup avec Eldorado, le film précédent du même réalisateur, à savoir Howard Hawks à qui l'on doit également en matière de western l'emblématique Rio Bravo.
Difficile d'ailleurs de ne pas trouver d'étrange similitude entre ces trois films ; les deux premiers suivent en effet en grande partie le même processus narratif avec des personnages différents certes et Rio Lobo même s'il prend une ligne directrice un peu différente se termine de manière (très similaire) à ceux précédemment cités : John Wayne et ses acolytes se retrouvent confinés dans le bureau du shérif, décident d'effectuer un échange ‘‘d'otage '' avec leurs ennemis puis bataille finale entre les deux partis le tout dans des décors fort similaires.
Ainsi on pourrait reprocher à Howard Hawks de manquer cruellement d'originalité dans cette fin de carrière devant la frappante similarité du final de ses films… mais ça serait en réalité plutôt réducteur.
En effet, en ce qui concerne Rio Lobo si le final du film ressemble à du réchauffé le film se démarque en abordant tout au long du reste du long métrage des thèmes différents des autres films, ou des situations sous des angles différents.
Déjà c'est un John Wayne plus âgé que l'on retrouve devant nous, ce qui fait que s'il est clairement et indiscutablement la tête d'affiche du film il m'a semblé pertinemment plus en retrait face aux personnages incarnés par Jorge Rivero, mais surtout par Jennifer O'Neill. Si son rôle reste central, il sait s'effacer devant la relation amoureuse que vivent les deux autres personnages principaux du film.
Ensuite, si le final est similaire, il présente les choses dans un ordre inversé, puisque c'est ici John Wayne et ses compagnons qui affrontent le shérif (bon un shérif véreux, criminel, mais techniquement un shérif quand même). Cependant, on pourrait regretter alors que cette idée un peu novatrice ne soit, en réalité, qu'un peu vite survolée et ne change, au final, pas tant que ça grand-chose au schmilblick.
Non là où en réalité le film se démarque à mon sens le plus pertinemment de ses deux grands frères. C'est en faisant de John Wayne et les principaux protagonistes et antagonistes des vétérans d'une encore fraîchement achevée guerre de sécession. Mais ici nulle question de prolonger la guerre plus loin qu'après la paix, puisque John Wayne s'allie à deux anciens confédérés, avec qui il avait sympathisés à la fin de la guerre, pour faire face à deux ‘yankees' espion. Il est ainsi intéressant de voir comment après la guerre des hommes qui s'étaient affrontés très violemment et avec barbarisme (le film montre l'exemple d'un essaim d'abeilles lâché dans un wagon rempli de soldat) se jauge à présent avec respect et sympathie ; se voyant tous deux comme des vétérans d'un même pays dont la division éventée n'aura qu'une légère parenthèse qu'il est bon d'oublier.
On retrouve aussi dans le film, le (ou les) personnages d' Hawksian woman (https://en.wikipedia.org/wiki/Hawksian_woman), l'un des éléments typiques des films du réalisateur. Mais qui paraît ici mis plus en avant que dans les deux autres westerns précédant du réalisateur, dans ce film sorti au tout début des années 70, dernier film du réalisateur à une date où le western n'était déjà plus le grand genre de film emblématique.
Un film qui manque donc sans doute d'originalité et dont le final déçoit forcément au 1er visionnage, mais qui parvient tout de même à aborder ‘‘ce déjà-vu '' sous un prisme différent et assez novateur.