Albert Mak n’est pas le réalisateur de Hong Kong le plus connu, loin de là, et pour cause, il n’a réalisé que 9 films dans les années 2000/2010 dont le plus connu est Dummy Mommy Without a Baby (2001) coréalisé avec Joe Ma. Mais Albert Mak a longtemps œuvré dans l’ombre, et a été assistant réalisateurs sur de nombreux films de Hong Kong bien plus connus tels que The Magic Crane (1993), Beyond Hypothermia (1996), Metade Fumaca (1999) ou encore Shinjuku Incident (2009). Il revient en 2024, 14 ans après sa dernière réalisation Forget Me Not (2010), avec Rob N Roll, un film de case mélangeant polar et comédie noire, un film tourné en 2021 mais ne sortant qu’en 2024 et qui a rencontré un joli succès à Hong Kong et en Chine pour sa sortie au nouvel an chinois. Alors, est-ce qu’avec son casting de têtes connues du cinéma de Hong Kong (Lam Suet, Gordon Lam, Aaron Kwok, Richie Ren, Michael Wong, David Chiang …) dans des rôles plus ou moins importants, Rob N Roll réussit son pari ? Presque.


Nous sommes ici dans une histoire tragicomique avec par moments un côté loufoque, un mélange qui pourra en surprendre certains entre violence parfois graphique et humour décalé. Une histoire de casse qui aurait pu être classique mais qui prend une tournure absurde assez unique. Outre le polar et la comédie, Rob N Roll aborde les thématiques de la complexité des relations humaines et des absurdités de la vie. Le scénario est délicieusement alambiqué, il nous est raconté avec une certaine assurance, mais pêche peut-être un peu par un surplus de rebondissements qui finalement sont assez prévisibles. Une histoire de malchance et de coïncidences, avec des sacs d’argent malencontreusement échangés / égarés / volés qui va malgré tout être très divertissante à regarder et rappelant parfois le cinéma de Johnnie To période PTU. Coproduction avec la Chine oblige, il est facile de connaitre le sort de certains personnages car les restrictions imposées aux films sino-hongkongais veulent que les criminels n’aient pas une fin heureuse. Du coup, nous sommes devant un film dont les deux premiers tiers sont réellement réussis, parfois surprenants, mais avec un dernier tiers plus conventionnel malgré l’intrigue assez labyrinthique du départ, comme si, une fois les trois personnages principaux réunis, le scénario ne savait plus trop quoi en faire. Rob N Roll bénéficie d’une mise en scène correcte, avec une photographie soignée, des cadrages et des montages faisant la part belle aux personnages, mais aussi avec pas mal de faux raccords qui font parfois grincer des dents. L’action n’est pas en reste, bien lisible, avec une musique qui colle parfaitement aux images, mais des effets spéciaux parfois un peu trop voyants.


L’humour léger du film fonctionne, généré soit par les clichés volontaires (genre Michael Wong et son éternel cigare), des situations funs, les personnages, les échanges qu’ils ont entre eux, virant souvent dans l’humour noir, dans cette histoire de 2 pauvres gars qui vont se retrouver embarqués malgré eux dans quelque chose qui les dépasse à cause de quiproquos. De l’humour oui, mais lorsque le film se fait sérieux, il se fait très sérieux, devenant violent, même sans concession parfois. Car le film est avant tout un drame, avec des protagonistes à la vie pas très rose. Gordon Lam incarne un chauffeur de taxi découragé par la vie, poussé à bout par sa mère âgée et sa femme enceinte. Son ami Fei, joué par Richie Ren, est veuf, père d’une petite fille, endetté jusqu’au cou, et a du mal à tenir à flot la maison de retraite qu’il gère. Tous deux ont l’idée de faire un cambriolage pour renflouer les caisses, mais vont se retrouver mêlés à un vrai vol d’argent mené par le bandit Mui, joué par Aaron Kwok, un ancien catcheur devenu bandit « voleur mais pas tueur », quelque peu déséquilibré à cause d’un passé traumatisant. Aaron Kwok semble énormément s’amuser dans un rôle excentrique, fausses dents en avant et prothèses d’oreilles, excellent en bandit qui veut tout le temps qu’on lui dise merci. Le duo formé par Gordon Lam / Richie Ren fonctionne à merveille et on sent l’alchimie entre les 2 acteurs. Au niveau des seconds rôles, les vétérans Lam Suet, David Chiang et Michael Wong livrent une très bonne prestation. On sera par contre déçu du duo de policier, incarnés par Maggie Cheung et Leung Chung-Hang qui semblent souvent oubliés, jamais développés, et au final peu utile à l’histoire. Le film est parsemé de personnages très humains, plein de failles, et rapidement attachants, que le scénario prend le temps de bien développer, jusque dans leurs petites manies, avec des dialogues plein d’esprit.


Bien qu’il déçoive dans son dernier acte, Rob N Roll est une bobine qui, avec son excellent casting, ses changements de tons fluides et son humour parfois loufoque, sait se montrer divertissante. Un film pas parfait, non, mais néanmoins sympathique.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-rob-n-roll-de-albert-mak-2024/

cherycok
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le 16 oct. 2024

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