Avec ce film on tient peut être la meilleure comédie musicale« c’est con mais c’est bon » depuis Mamma mia, en encore plus débilou. Une histoire éculée ; des étoiles plein les yeux, Sherry sort de son Amérique profonde pour conquérir L.A.. Et la un petit miracle se produit : on sourit. L’arrivée de la miss est prétexte à un déluge abrutissant de clichés sur L.A. plus rebattus les uns que les autres : rêves de carrière musicale, optimisme niaiseux, putes dans les rues. Mais on est content. Parce qu’elle chante !


Avec un enthousiasme communicatif, elle chante de la soupe mainstream joyeuse et entraînante. La, soit on se fâche et on se barre, soit on laisse au vestiaire toute exigence cinématographique pour sourire jusqu’aux oreilles, en comprenant qu’on est parti pour 2h de mièvrerie musicale outrancière sans autre rapport avec le Rock que le titre du film (le seul "vrai" morceau rock arrive au générique de fin, il n'était sans doute pas assez consensuel pour être largué avant).


Mieux vaut sourire, l’énergie débordante des joyeux lurons ayant participé à cette aventure le mérite bien. A commencer par le sympathique prince charmant à la fosse au menton qui volera au secours de la nouvelle venue. Ben oui, sherry-plus-cruche-que-moi-tu-meurs n’est pas arrivée depuis 2 minutes qu’elle s’est déjà fait piqué sa valise ! Heureusement Drew débarque en courant, mais avec un poil de retard, ce qui le fait sautiller sur place en s’arrêtant à la hauteur de la demoiselle en détresse, gesticulation signifiant sans doute en langage corporel beau gosse "il est trop loin pour que je le poursuive mais si je le tenais hein…».


Il s’appelle Drew, elle Sherry, ils totalisent à peine à eux deux le QI d’une huitre, et c’est parti pour un époustouflant concours pour décrocher la palme du culcullapraline. Confondants d’innocence naïve et idéaliste, il font leur chemin tant bien que mal, car, c’était écrit, un quiproquo mélo va mettre à l’épreuve leur détermination amoureuse et professionnelle, ah la la, la vie est dure ! Mais c’est justement cette surenchère délibérée dans le gnangnan qui les rends sympathiques, ou en tout cas moins insupportables que Bella et Edward se regardant avec des yeux de merlans frits.


Le duo principal n’est pas le seul à faire dans la subtilité éléphantesque ; il est escorté d’une flopée de seconds rôles succulents. C’est ce genre de film qui donne son sens à l’expression « galerie de personnages ». Tous hilarants ; Cranston en maire puritain qui succombe avec délice à des jeux sadomaso dès que sa femme (Zeta-Jones) a le dos tourné, occupée en bonne bigote par sa croisade contre la corruption morale de L.A., et plus particulièrement contre Russel Brand et Alec Baldwin, amis (et plus si affinité) responsables bon an mal an de la survie du temple du Rock « The Bourbon » ou travaillent Sherry et Drew.


On a en prime Giamatti en producteur lâche et cupide à qui on ne confierait pas un kopeck, ca ne se rate pas. Si le ridicule tuait il ne serait pas resté grand monde à la fin du tournage, chacun y allant de sa chansonnette et de sa réplique débile. Et c’est un vrai bonheur de voir ces acteurs rares et doués saisir l’occasion de se lâcher en un festival de second degré. Mais le meilleur est à venir…


Cruise Le Grand est définitivement sacré champion du pince sans rire. Arborant le visage impassible d’un homme perdu dans un monde qui n’est plus le notre, il incarne avec génie un seigneur du rock décadent, Stacey Jaxx. Quand il tient debout, Stacey ne semble jamais vraiment savoir ou il est, non pas qu’il s’en soucie d’ailleurs, tant qu’il y a une bouteille à portée de singe. Le potentiel comique de cette gueule de bois constante explose lors des retrouvailles entre un Stacey Jaxx pour le moins hermétique et un Baldwin déconcerté, séquence d’anthologie qui vaut à elle seule le détour. Alors qu’on se demande si son esprit est illuminé ou dévasté par les excès du corps, le personnage apporte la seule note de noirceur rock authentique dans ce joyeux magma kitsch queer qui flirte régulièrement avec le grotesque.


Dans le fond la morale du film est à peine moins conformiste que celle des cul bénis qu’il ridiculise ; « L’amour Vrai Monogame (qui triomphe de toutes les épreuves evidement) est de loin supérieur à la débauche de sexe », « on a tous droit à une seconde chance » et « il faut croire en ses rêves », tout y est. Illustrée avec un summum de gnangnan assumé et auto parodique, elle n’est Dieu merci visiblement prise au sérieux par personne. Elle sert juste de ciment à une comédie musicale voulue la plus conne possible, qui joue la carte de l’innocence perdue et retrouvée avec un second degré rafraichissant. Tout est écrit d’avance mais on s’en fout, Rock forever est avant tout une bonne occasion de se marrer et de taper du pied.

ventura
8
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le 29 juil. 2012

Modifiée

le 2 août 2012

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ventura

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