Towards the within
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Room ? Le scénario me tentait, mais c'était surtout pour revoir Brie. Alors quand la dame a remporté son Oscar de meilleure actrice pour son rôle dans ce film, j'ai un peu chamboulé mes plans et l’ai vu plus vite que prévu. Est-ce qu'elle mérite son Oscar et est-ce que le film vaut la peine ? Putain oui ! Ça m'a toujours choquée qu'une personne qui est née la même année que moi peut faire autant de choses et les réussir brillamment. Je crois que je me compare constamment, c'est un peu con je crois... Bref, Brie étant née en 89 également, je trouve ça incroyable qu'elle soit si jeune et que sa performance soit aussi excellemment récompensée, d'autant contre des actrices très prestigieuses, mais après coup d’œil, c'est hautement mérité. Car il s'agit bel et bien d'une performance qu'elle nous offre là : exténuée, au bout du rouleau, sans espoir... Elle retranscrit parfaitement les émotions, et d'ailleurs, elle m'a fait chialer plus d'une fois, moi qui généralement, ne verse pas de larme. L’histoire est scindée en deux : le dedans et le dehors, la chambre et le monde… D’ailleurs le film joue pas mal sur les oppositions, permettant à Ma d’expliquer la vie plus facilement à Jack : il y a les vrais gens (elle et lui) et les gens de la télé, il y a elle et Méchant Nick… Ce que je trouve dommage, c’est que dès le synopsis et la bande annonce (que je vous conseille d’éviter sciemment), on sait que les deux vont sortir de la chambre pour (re)trouver leur vie. Il aurait peut-être été plus judicieux de laisser le doute planer, d’émettre l’hypothèse qu’ils resteraient là. Et encore, quand je dis « dommage », c’est un peu fort, parce que les deux parties sont très intéressantes, tout en étant différentes. Notamment au niveau du ton, car la première partie joue davantage sur le suspense, parfois même sur le thriller, sur l’évasion des deux qui germe. Mais toutes les deux restent profondément dramatiques. Rassurez-vous, Room n'a aucun côté tire-larmes, le sujet est certes grave, mais il est absolument bien retranscrit et se suffit à lui-même pour ne pas en rajouter et en faire des tonnes. D’ailleurs, on se souviendra tous de l’horreur de l’affaire Fritzl, point de départ au roman dont a été adapté Room, cette histoire sordide où un père de famille a retenu des années en otages une de ses filles et les enfants qu’ils ont eus ensemble dans un bunker… Les deux parties du film sont donc dramatiques, mais sont aussi basées sur la découverte : lors de la première, nous découvrons le monde de Jack et Ma, leur mode de fonctionnement, les mensonges énoncés par Ma à son fils pour qu’il ne comprenne pas ce qui lui arrive et surtout, pour le protéger, de leur tortionnaire mais aussi d’éventuels faux espoirs. Lors de la deuxième, c’est Jack qui découvre notre monde et apprend à être un petit garçon comme les autres, non sans heurt, surtout pour Ma qui sera confrontée à tout ce qu’elle a perdu.
Notre point de vue de spectateur épouse le point de vue de Jack, car c’est à travers ses yeux que nous regardons la chambre d’abord, puis le monde. D’ailleurs, c’est les mots de Jack que nous avons comme voix off, il est notre narrateur. La caméra est souvent à sa hauteur, certaines paroles de Ma envers Jack sont lourdes de sens et sans ambiguïté pour nous, mais surtout, pour lui, Méchant Nick est un homme qui offre des cadeaux le dimanche et pour ses 5 ans, pour nous, c’est un enfoiré de bourreau, et accessoirement, le père de l’enfant… Quand lui regarde à travers la porte pour observer Méchant Nick, nous, nous voyons Ma se faire violer. Ce procédé est, je trouve, très habile et permet non pas l’atténuation des actes ignobles dont sa mère et lui sont victimes, mais plutôt, de montrer l’amour qu’a Ma pour Jack.
Car, malgré tout, Room décrit une belle histoire fondée sur l’espoir, car c’est bien ce sentiment qu’il faut retenir et qui a été le ciment de la relation de la mère et de son fils. Peu importe ce qu’ils ont vécu, Ma tente tout pour sortir Jack de cet enfer. D’ailleurs, je trouve davantage habile de nous montrer cette partie de l’histoire, plutôt que de consacrer la seconde moitié du film au procès du tortionnaire. On reste dans le même ton, car c’est l’histoire de Ma et de Jack, pas celle de Méchant Nick qui en a déjà assez fait… En effet, ce point de vue est très intéressant et a la qualité d’être réaliste. Même la musique s'accorde avec cette césure : absente lors de la vie dans la chambre, elle surgit dehors, comme si elle aussi, avait été enlevée.
A côté de ça, l'acteur jouant Jack, Jacob Tremblay (dont tout le monde entend parler au lendemain des Oscars) est prometteur, il porte le film brillamment.
L’œuvre est belle, triste et juste. Ce film vaut véritablement son visionnage. Bref : bravo Brie Larson, tu l'as méritée ta récompense !
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Créée
le 1 mars 2016
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