Pendant une nuit, la plus courte de l'année, Alba et Natasha vont vivre une grande histoire, faite de confidences, de cachotteries, de promesses et de fusions corporelles délicates (dans la mesure du possible anatomiquement parlant). Dirigé par un spécialiste dans le genre, à la carrière faste mais pleine de trous (Julio Merdem), Room in Rome n'est pas un porno chic, mais bien une romance érotique à la mise en scène maniérée. Ou encore une sorte de Grande Belleza dégradé en huis-clos très juvénile.
Jusqu'au bout la séance aura un côté brochure cinq étoiles animée. Les parallèles avec la Renaissance italienne depuis la room de l'hôtel en font une espèce de rêverie saphique, pénétrante mais superficielle comme le serait une publicité de luxe. Quasiment tout le film se déroule dans la chambre et tient dévêtues les deux amantes. Le dispositif est charmeur et caricatural. Pris pour eux-mêmes, les bavardages sont assez soporifiques, mais servent les jeux entre Alba et Natasha, décidées à emprunter des masques et avancer par paliers pour éviter de trop s'exposer, de se briser ; d'abîmer cette passion, éventuellement par l'engagement, pourtant de plus en plus évident.
Une BO doucereuse accompagne la pseudo tragédie qui n'en finit pas. L'essentiel est à base de lyre et de voix éthérées, tendant éventuellement au Dead Can Dance de chambre ; Jocelyn Pook (l'auteure de l'hymne à l'envers de Eyes Wide Shut) assure plusieurs compositions. Des morceaux plus tièdes et mielleux, proches de la bluette pop, viennent nuancer la donne quitte à en corrompre l'élégance – c'est le cas notamment de ce Loving strangers. Le roman-photo est sophistiqué et son cadre verni, mais la préciosité est une orientation avant d'être une garantie. Exempt de grivoiserie, Room in Rome est un plaisir malgré tout assez trivial, une proposition minimaliste ayant toute sa place sur le canal privé d'une auberge luxuriante.
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