Le film commence doucement avec l’installation d’un jeune couple dans un appartement mystérieux au premier abord. Le premier acte qu’ils accomplissent avant même d’aménager leur nouvel espace est un acte charnel, un détail qui, à mon sens, pose les bases de tout le film. Ce dernier explore les thèmes du sexe et de la complexité des relations conjugales tout en confrontant subtilement le monde moderne et rationnel à celui des superstitions, de la sorcellerie et du paranormal.
Polanski nous entraîne dans un récit d'une intensité croissante où l’angoisse et le malaise s'installent peu à peu. Il joue habilement avec nos perceptions, alternant entre la paranoïa croissante de Rosemary et l'idée d'une réelle conspiration ourdie contre elle. La grande réussite du film réside dans son ambiguïté : tantôt on se sent complice de la folie de Rosemary, tantôt on perçoit une menace tangible et oppressante qui pèse sur elle.
Le scénario et la mise en scène sont magistraux, maintenant une tension constante du début à la fin. Polanski utilise une caméra intelligente et immersive qui nous enferme littéralement dans l’espace de l’appartement, créant une atmosphère claustrophobique qui reflète la descente psychologique de l’héroïne. Les dialogues, empreints d'une banalité apparente, cachent souvent des doubles sens qui ne se révèlent qu'avec le développement des événements.
Mia Farrow livre une performance inoubliable, incarnant avec brio une femme tiraillée entre ses instincts, ses doutes et la pression sociale d’une maternité parfaite. La transformation de son personnage est aussi troublante que fascinante, nous emmenant au plus près de sa vulnérabilité.
Enfin, "Rosemary's Baby" est plus qu’un film d’horreur : c’est une réflexion sur le contrôle, la manipulation et le patriarcat, habillée sous les traits d’un thriller psychologique. Polanski réussit ici une œuvre intemporelle qui continue de hanter ses spectateurs bien après le générique de fin.