Aaaah, le Danemark du dix-huitième siècle... Son obscurantisme religieux, ses mariages arrangés, sa noblesse très riche, son peuple très pauvre, ses petits arrangements à la Cour. Rien de bien différent avec la France à la même époque en fait. Fort heureusement, le dix-huitième est aussi connu pour être le siècle des Lumières, et les idées révolutionnaires portées par des philosophes comme Rousseau et Voltaire jetteront à l'époque, et de manière assez radicale, un voile d'ombre sur l'absurdité du système monarchique.


C'est cette trame historique qui sert de base à Royal affair, dont la réalisation très académique est à la fois le principal atout et la principale faiblesse : atout, parce qu'on s'aperçoit vite qu'on va avoir affaire à un film sérieux, documenté, à l'esthétique agréable, porté par une histoire qui pourra s'avérer riche en rebondissements ; faiblesse, parce que ce classicisme ambiant n'apporte aucun sentiment de nouveauté dans le traitement du sujet, qu'on a l'impression que c'est le genre de choses qu'on a déjà vues cent fois, et que m*rde, ça dure plus de deux heures, donc ça sent quand même le coup fourré si le scénario ne parvient pas à captiver réellement. Bref, pas de grosse prise de risque de la part de Nikolaj Arcel, qui en est quasiment à ses débuts en tant que réalisateur et a certainement préféré assurer le coup.


La bonne nouvelle, c'est que oui, l'histoire est assez solide pour nous embarquer en pays danois sans que l'on prenne un coup de froid. Mads Mikkelsen, qu'on ne présente plus, change encore de registre et enfile son plus beau costume en incarnant cette fois un docteur aux idées progressistes qui, sur un coup du sort, va carrément devenir le médecin du roi, comme ça, cash, au point de se rendre indispensable auprès de lui, voire de le manipuler sans vergogne pour la bonne cause. Petit détail important : Christian VII, ledit roi, a effectivement une case en moins et semble incapable de diriger quoi que ce soit. Autre petit problème : la reine qui lui a été promise, naïve pucelle anglaise, tombe rapidement de haut en le voyant se livrer à ses pitreries et possède, elle aussi, de grosses prédispositions pour les idéaux philosophiques en vogue.


On l'aura compris, dans ce contexte, la rencontre entre ce médecin relativement âgé la jeune altesse ne pouvait que faire des étincelles... Ce qu'elle fera. Comme souvent dans les films qui explorent la grandeur et la décadence de la monarchie, on atteint le dénouement en ayant l'impression d'avoir eu notre compte de trahisons, de secrets, de tromperies, de faste, de volupté et de têtes coupées. Mais le véritable intérêt de Royal affair réside dans la démonstration juste et soignée qui est faite de l'exercice du pouvoir, jusqu'à provoquer des situations paradoxales, voire inextricables : qu'il soit fou ou pas, le roi n'est clairement qu'un pantin influençable entre les mains de ses conseillers (quelles que soient leurs intentions), pitoyable vitrine destinée à amuser la galerie ou encaisser toutes les critiques. Quant au peuple, les droits et libertés qu'il désire le portent autant qu'ils l'effraient, et il n'a à l'époque pas suffisamment de recul pour s'apercevoir qu'on le manipule, et qu'il envoie à l'échafaud des gens qui ne souhaitaient lui apporter que ce qu'il désirait.


Un bon biopic où la tension monte crescendo, avec son lot de destins brisés, qui dépeint avec talent et élégance les contradictions d'un Danemark et d'une Europe à un tournant de leur histoire.

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le 17 août 2016

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Psychedeclic

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