De quoi hurler au sabotage !
Alors qu’il n’était connu que comme le scénariste de l’imparable Training Day, David Ayer s’est depuis essayé à la réalisation en commençant par Bad Times mais sans trouver une quelconque reconnaissance. Il faudra attendre 2012 et son End of Watch, une plongée dans le quotidien de deux flics de L.A. filmée en caméra subjective, pour que le grand public retienne son nom. Alors que sort tout juste son dernier film Fury, et qui reçoit à son tour quelques éloges de la part des critiques, le cinéaste est d’abord passé par Sabotage, l’un des nombreux films d’action censé remettre notre cher Arnold Schwarzenegger sur le devant de la scène (avec Le Dernier Rempart et Évasion). Nouveau film qui a le mérite d’attirer notre attention ?
Une affiche présentant Schwarzy entouré d’autres gros bras (masculins et féminins) qui ne demandent qu’à en découdre. Des bandes-annonces qui insistent bien sur le côté action du film et la bande de potes que composent nos différents héros. Il n’y a pas à dire : Sabotage est une resucée d’Expendables, ni plus ni moins ! Un manque d’originalité évident ? Peut-être bien, mais vu le statut du long-métrage (divertissement bourrin avec l’ex-Gouvernator en tête du casting), il ne fallait vraiment pas s’attendre à grand-chose. Alors oui, Sabotage ne sort pas des sentiers battus, mais ce n’est pas le scénario que nous recherchons en priorité ici. Plutôt l’adrénaline. Et c’est pour cela que la comparaison avec Expendables va lui être fatale : le film de David Ayer est une version du pauvre de la clique à Stallone. Film d’action vous dit-on depuis l’annonce du projet ? Que nenni ! Sabotage est mou du genou ! Des séquences explosives, vous n’en aurez aucune ! Juste deux scènes d’interventions (avec plus d’une heure les séparant) et une course-poursuite finale qui manque de punch. Le reste du film : que de la parlote ennuyeuse, sans le moindre intérêt.
Alors oui, Schwarzy joue un rôle différent de d’habitudes (nous sommes bien loin de M. Muscle qui veut casser tout ce qu’il voit). Oui, l’histoire se présente sous la forme d’une enquête qui aurait pu nous captiver ne serait-ce qu’un minimum. Mais il n’y a rien dans Sabotage qui puisse corriger la déception face à ce honteux manque d’action. À commencer par la trame même, enquête qui a bien du mal à captiver le spectateur à cause de son aspect brouillon et pris à la légère. Qui préfère s’engluer dans du salace à tout-va : de la violence gratuite et un humour en-dessous de la ceinture à deux balles. Le fait que Schwarzy soit entouré de complices manquant de charisme (Josh Holloway, Joe Manganiello), n’ayant rien à faire là (Terrence Howard) ou au look improbable (Sam Worthington) y est également pour quelque chose, car s’attacher à l’un des personnages aurait justement été bénéfique pour l’histoire. Malheureusement, chacun ne réussit nullement à s’imposer, étant bien loin, encore une fois, des Expendables (Sylvester Stallone, Jason Statham, Jet Li, Dolph Ludgren…). Bref, Sabotage veut nous proposer une histoire, cela ne fait pas l’ombre d’un doute. Seulement, avec une écriture aussi peu subtile et foirée, des personnages inintéressants et un suspense éventé à cause de ce fameux manque d’intérêt, la sauce ne prend pas.
Mais là où Sabotage se vautre également, c’est du côté de la mise en scène. Avec End of Watch, David Ayer avait montré qu’il était un véritable réalisateur. Que sa façon de filmer pouvait servir au récit, voire au film dans son intégralité. En voyant Sabotage, nous nous demandons aussitôt : « mais pourquoi Ayer a-t-il fait un truc pareil ? ». Sans doute approcher au plus près possible de l’ambiance salace et brutal du scénario, tout en gardant un aspect réaliste à l’ensemble. Une attention louable, il faut bien le reconnaître. Mais le rendu final est tout simplement immonde. Entre un montage réalisé à la serpe (certaines séquences sont coupées en plein milieu, sans raison) et des plans qui se rapprochent plus du reportage sur France 2 plutôt que du film bourrin et sans prise de tête qu’il aurait dû être, en passant par des plans en caméra subjective qui répondent présents sans explication, autant dire que Sabotage rejette plus l’attention qu’autre chose. Donnant l’impression d’un long-métrage au visuel véritablement crade et qui n’est pas digne d’un film sortant en salles.
Que le film se soit lamentablement vautré au box-office, bien plus que Le Dernier Rempart et Évasion, n’est pas un hasard. Si le réalisateur semble s’être relevé avec Fury, Schwarzy, lui, devra attendre le cinquième opus de la saga Terminator pour tenter de renaître (enfin) de ses cendres (en espérant que le film soit bon, bien évidemment). En attendant, nous devons nous contenter d’un Sabotage qui mérite bien son titre, à tel point de faire perdre 1h49 de notre temps.