Cette critique est en grande partie une réponse à celle de Weliany:
http://www.senscritique.com/film/Sadhu/critique/26648437

Je ne savais pas à quoi m'attendre en allant voir le film, mais le beau voyage et la quête spirituelle qui t'ont paru manquer étaient bien là pour moi. Bien sûr, Suraj Baba, le sâdhu (chercheur de vérité), ne vit à aucun moment l'illumination religieuse à laquelle on pourrait s'attendre et il ne délivre pas vraiment de perles de sagesse style Dalaï-Lama.
Mais c'est parce que, contrairement aux apparences, il ne s'agit pas d'un docu sur l'hindouisme, pas plus que sur la vie des ermites. Le film porte plutôt, à la limite, sur la nature de la foi, mais surtout sur celle de l'Homme.
Et c'est clairement ce qu'on nous montre: un homme. Le sâdhu est légèrement à l'ouest, certes, et il a ses défauts: encore une fois, il n'est pas un grand sage, il n'est pas un Dalaï-lama ou un moine Shaolin, juste un ermite un peu perdu. Mais il est surtout, comme - je pense - un paquet d'êtres humains, en proie à la timidité, à l'anxiété face au retour vers la société, au doute surtout, et en effet, il remet en question un "ordre établi depuis des siècles."
Et alors, c'est un défaut ça? Cela ne l'empêche pas de se remettre lui-même en question, car la raison même de son pèlerinage est qu'il a atteint une impasse sur son "chemin spirituel", et il finit, dans la dernière demi-heure du film, par conclure qu'il n'est plus un sâdhu. J'appelle ça se remettre en question, et je ne pense pas que juger s'il a tort ou raison de choisir une voie éloignée de l'institution religieuse ait grand-chose à voir avec la qualité du film.

Par ailleurs, le fait que le réalisateur ait, ou non, respecté les codes du style documentaire... Je pense que le but est avant tout de faire un film, pas de respecter les codes d'un cahier des charges. De plus, il me paraît douteux que la grande majorité des documentaires n'influencent pas leur sujet, vu qu'une bande de types avec des caméras et des perches a souvent tendance à influencer le comportement des gens; mais c'est une autre histoire...

La photo est soignée, la bande son mêle ingénieusement la voix et la guitare de Suraj à la musique ajoutée au montage, enfin, le montage, qui permet à la narration de se débarrasser de toute intervention orale du réalisateur, me paraît un choix judicieux puisqu'elle permet un contact plus personnel avec le sâdhu et met en valeur ses adresses à la caméra.

Evidemment, le rythme contemplatif en ennuiera certains, mais j'ai préféré suivre Suraj Baba à son rythme, rire avec lui et réfléchir avec lui.
Sâdhu est un beau film, pas vraiment un documentaire, pas du tout une fiction, mais plutôt un petit essai philosophique au cinéma, en tout cas un film que je recommande volontiers.
DanGerous
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le 24 nov. 2013

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