Saminjo est la deuxième réalisation du génial Park Chan-Wook, après le convenu Moon Is the Sun's Dream qui s'avère une simple relecture sans inspiration des mythes scorsesiens. Nous servant la fameuse ritournelle des paumés qui se trouvent et se complètent, Saminjo s'inscrit aussi dans cette veine mais le fait avec plus d'originalité et de qualité. Ceci se ressent tout d'abord dans le soin apporté à l'écriture des personnages, qui, si elle n'est pas révolutionnaire, témoigne tout de même d'une certaine originalité. Ainsi le triangle central du film verra se rencontrer un musicien raté, dépressif et suicidaire dont il n'est pas étonnant que sa femme le trompe tant il semble faire tout effort pour bannir le mot "fun" de sa vie, son frère : un débile profond ayant trouvé dans le meurtre rémunéré sa seule porte de sortie et une serveuse dont la vie tourne en rond et l'enfant vient d'être kidnappé.
Nous suivrons donc cette étrange troupe alors que leurs trajectoires de vies se fondent en une trame commune soudée par le crime. Bien que la thématique change peu, une identité plus forte se dégage de ce film et en fait quelque chose de plus qu'un Scorsese du pauvre.
Il surprend notamment techniquement, lors de quelques scènes bluffantes et audacieuses cinématographiquement annonçant ce qui caractérisera le génie de la carrière du cinéaste. Hélas ces fulgurances restent assez rares et un final qui part dans tous les sens vient quelque peu gâcher tout ce qui avait été jusqu'ici correctement construit, semblant le faire rentrer dans un cahier des charges avec fusillades et histoire d'amour ne faisant guère sens.
S'il prend son temps pour nous introduire les personnages, leur donnant une certaine complexité et fait preuve de fulgurances ce qui en fait un divertissement honnête, Saminjo reste, de par son ambiance trop bordélique, peu folichon dans l'ensemble. Il est assez incroyable de se dire que le film suivant du réalisateur sera le génial JSA.