Samurai Avenger: The Blind Wolf par NotQuiteDead
Les alchimistes de tout poil en rêvaient, le septième art y est parvenu.
Transmuter en or du bête plomb n'est cependant pas à la portée du premier gâcheur de pellicule venu et rares sont les films suffisamment mauvais pour transcender leurs imperfections et confiner au mythe.
Pour ceux qui souhaitent s'y risquer, la recette est décrite par Mel Brooks dans son très sympathique Les Producteurs (1968):
Ingrédients:
- un mauvais scénario, si possible minimaliste et prévisible, à la limite de l'incohérence
- des acteurs médiocres
- des effets spéciaux moisis
- des dialogues insipides
- peu voire pas de moyens
Préparation:
- réalisez le tout outrancièrement
Le petit plus:
- en cas de doublage, n'hésitez pas à recourir à de mauvais comédiens
Si certains apprentis-sorciers réussissent pour ainsi dire malgré eux à nous pondre des chefs d’œuvre du genre Mosquito (Gary Jones - 1995), force est de soupçonner que d'autres comme Kurando Mitsutake savent pertinemment ce qu'ils font. Et de fait, Samurai Avenger - the Blind Wolf, commis en 2009, se détache clairement d'un cinéma d'exploitation souvent médiocre pour nous offrir un divertissement qui pique les sinus.
L'intrigue:
Tandis que le titre du film ne pouvait se concevoir sans un sous-titre, l'intrigue, elle, tient comme il se doit sur un mouchoir de poche.
Alors qu'il pique-niquait en famille, un pauvre japonais se fait violer, mâchouiller et assassiner sa femme par un ignoble psychopathe. L'infâme méchant lui promet d'épargner sa fille s'il se crève les yeux, mais ne tient évidemment pas sa promesse et laisse pour mort notre héros (interprété tout en finesse par le réalisateur lui-même), entouré des dépouilles encore fumantes de ses proches.
Notre aveugle déniche un providentiel maître en kenjutsu (l'intrigue se déroule dans la cambrousse californienne) et s'entraîne pendant huit ans pour cueillir le psychopathe à sa sortie de prison. Celui-ci engage sept assassins pour l'empêcher d'assouvir sa vengeance (ceux-ci, et c'est bien pratique, manient presque tous le katana).
Quand Prévert rencontre Tarentino:
A en croire cinequesting, Samurai Avenger - the Blind Wolf fait se rencontrer Tarentino et Kurosawa. L'affirmation est à prendre, à l'instar du film, au second degré.
On pourrait tirer en revanche un parallèle fécond avec les cortèges de Jacques Prévert. Reprenant à notre compte le slogan de la bande-annonce de Lesbian Vampire Killers (Phil Claydon, 2008), affirmons sans crainte: "One film has it all!" Pour s'en convaincre, dressons une petite liste alphabétique, sans prétendre toutefois à l'exhaustivité:
- un borgne
- du cannibalisme
- une césarienne
- un costume de Zorro
- des cowboys
- des décapitations
- des démembrements
- des flashbacks
- des greluches en bikini
- de l'hypnose
- des interludes culturels
- du japonais
- du latin d'opérette
- des litres d'hémoglobine
- un maître zen
- une mère castratrice
- une promesse de suite
- une prothèse robotique
- des scènes en noir-blanc avec le sang en rouge
- des seins nus
- un seppuku
- une sorcière
- une tenue de cuir rouge
- un twist final vraiment (censé être) surprenant
- un vieux fou
- une voix off
- des zombis
En bref, un western sushi valant le détour.