... And Justice for All
Peu de temps après le remarquable Chien Enragé, Kurosawa propose Scandale, où il est question d'un peintre et d'une jeune chanteuse piégés par un journal à sensation qui va créer une idylle...
le 6 mars 2017
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Moins d'un an après la sortie de Chien Enragé, Kurosowa, a jeté son dévolu sur une nouvelle espèce animale, les charognards ! Scandale relate en effet le feuilleton judiciaire entourant un article monté de toute pièce dévoilant une liaison cachée entre Miyako Sajijo, une chanteuse populaire et Ichirô Aoye, un peintre en devenir.
Campé par un Toshirô Mifune qui colle parfaitement à l'image de l'artiste excentrique un peu rebelle sur les bords, Ichirô est la marionnette que Kurosawa utilise pour scander tout le mépris et la révolte qu'il ressent à l'encontre de ce "crime modernisé".
L'idole des temps modernes ?
La photo-choc et l'écrit-témoignage !
Immoral, cynique et assoiffé par l'argent, cet écosystème médiatique en prend justement pour son grade. La prolifération de la nouvelle est bien illustrée. De nombreux plans juxtaposés montrant l'omniprésence des affiches dans la ville viennent renforcer cette sensation d'oppression. La scène de la confrontation physique entre Ichirô et la rédaction du journal bénéficie également d'un montage soigné. Elle souligne parfaitement le glissement qui s'opère brutalement entre l'euphorie ressentie par les auteurs du coup médiatique et leur sentiment de honte qui les ramène à leur responsabilité.
L'hégémonisme américain vient également nourrir le propos du film. Les deux stars au coeur du scandale sont habillées à l'Occidentale. Ichirô déplore le manque de sensibilité artistique de ses compatriotes face au Nu Artistique. On chante Merry Christmas en pleine rue à la sortie d'une beuverie.
Le réquisitoire constitue une toile de fond bien menée quoiqu'un peu prévisible. Passé un bon tiers, le film gagne en relief avec la mise en lumière d'un nouveau personnage : Hiruta, un avocat qui va se retrouver piégé dans une affaire de corruption le ballottant entre les intérêts des plaignants et des accusés.
Pathétique, maniéré, beau parleur, exerçant dans un taudis minuscule, usant de moyens illégaux pour faire plaisir à ses proches et rattrapés par les mauvaises graines qu'il a semées...je n'ai pas pu m'empêcher de faire la comparaison anachronique avec Saul Goodman. Mais le rapprochement a évidemment ses limites; Hiruta subit plus qu'il n'agit.
Il ne le fait pas par méchanceté mais par faiblesse.
Le jeu d'acteur de Takashi Shimura (4e collaboration) est assez impressionnant. Il fait preuve d'un engagement total et porte le film sur ses épaules avec beaucoup de justesse. C'est d'autant plus marquant que son rôle va à l'encontre de ses précédents.
.
Alternant des passages très légers et poétiques avec des scènes déchirantes dotées d'un travail de cadre particulièrement bien maîtrisé, ce film méconnu s'intègre bien dans la filmographie de son auteur. Si les dénonciations du film sont encore parfaitement d'actualité, je retiendrai surtout une histoire très attachante.
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films d'Akira Kurosawa
Créée
le 8 mai 2016
Critique lue 306 fois
3 j'aime
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