On va passer rapidement sur le titre français. Traduire, c’est bien. Traduire en reprenant les gimmicks des autres, c’est non. La personne en charge de la version française de “Long Shot” (qui désigne en anglais quelque chose de difficile à obtenir) aurait dû s’inspirer de son titre espagnol “Quasi Impossible”. Mais, d’ailleurs, le sujet du film est-il vraiment la séduction ?
Le film de Jonathan Levine s’ouvre sur Seth Rogen au milieu d’une réunion de neo-nazis. On découvre qu’il est journaliste et s’est infiltré dans le milieu pour un article. Risquant sa peau, il apprend le lendemain qu’il est mis à la porte, car son petit journal indépendant est racheté par un homme d’affaires influent qui ne sera pas sans rappeler Donald Trump. Sa route va alors le conduire sur celle de la Secrétaire d’Etat américaine, incarnée par une Charlize Theron toujours aussi impeccable. Il se trouve qu’ils ont un passé commun, puisqu’elle a été sa babysitter il y a bien longtemps. Il se trouve aussi qu’elle cherche une belle plume pour donner un coup de boost à ses discours. Elle engage son vieux copain, barbu et s’habillant à moitié en survêtement, soit quelqu’un de bien loin des milieux politiques.
La suite, vous la devinez aisément. Ils sont de deux univers trop éloignés. Elle brigue la Présidence et lui veut remplir son frigo. Il a un physique ingrat et s’habille mal. Elle est sublime. Et entourée de gens qui lui déconseille évidemment de flirter avec lui. Mais ils ont un passé commun qui va les rapprocher mais aussi les obliger à faire des choix. Finiront-ils ensemble ? Vous avez forcément une petite idée qui est la bonne.
Pourtant, derrière cette comédie qui parait déjà vue, se cache autre chose. Déjà, Jonathan Levine est très bon pour la mise en scène, et les acteurs s’en donnent à coeur joie. Ensuite, l’écriture est suffisamment fine pour slalomer entre les facilités. On a beau se douter de la suite, on ne peut que s’attacher à eux deux. Ils sont adorables, tous les deux, vraiment. Se cache aussi de l’humour solide, parfois noir, parfois trash, parfois juste drôle comme Seth Rogen s’est appliqué à en faire dans ses précédentes comédies. On rit beaucoup et de bon cœur
Surtout, Long Shot a d’autres choses à raconter, à commencer par la politique américaine qui en prend pour son grade. Andy Serkis est absolument merveilleux (et méconnaissable) en caricature de Donald Trump, à la fois arriviste et dégoutant. Et puis le film joue avec les codes du genre, puisque cette fois c’est le personnage féminin qui est en haut de l’échelle. On est désormais très loin des histoires à la Pretty Woman. Ce Long Shot se révèle être, sous ses faux airs de comédie romantique, un film féministe et inclusif très “2019”. Comme quoi, quand c’est bien fait, tout est possible et on peut rire de tout…
Sous ces airs de déjà-vu, Long Shot cache un film bien plus dense qu’il n’y parait. Et si c’était tout simplement la meilleure comédie romantique depuis bien longtemps ?