Après The Foreign Duck, the Native Duck and God in a Coin Locker et Fish Story, Yoshihiro Nakamura confirme son talent à raconter des histoires de manière originale et touchante dans ce joli film, porté par des personnages attachants - belle direction d'acteurs -, et un rythme agréable à suivre - malgré l'exposition d'un quotidien monotone mais rendu intéressant par les différents angles portés sur ce dernier -. Reprenant son acteur fétiche principal Gaku Hamada, on suit le parcours d'un jeune homme qui a visiblement un problème à sortir de son quartier d'origine. Film à tiroirs - un pattern de ce réalisateur -, cette amorce de départ sera le prétexte pour traiter de l'évolution d'un milieu en perpétuel changement (habitants, sentiments, apparence des immeubles) tandis que ce curieux individu demeure le même, résistant jusqu'au bout dans ses habitudes et obsessions faisant de lui un adulte aux manières d'enfant, et découvrant peu à peu la manière dont les autres le perçoivent, et combien son horizon est tout petit par rapport à ce qu'il soupçonne du monde.
Certes, ce film est un poil moins bon que les deux autres films du même réalisateur que j'ai pu voir, la faute à un récit un peu moins ambitieux et puissant, mais il serait dommage de passer à côté de ce joli film-témoin d'une communauté que l'on découvre sous de nombreux aspects, tour à tour accueillante, désenchantée, étrange, voire menaçante, tant par les différentes positions qu'occupent le personnage principal (ainsi être ami ou amoureux d'une même personne, client ou vendeur d'un même magasin, peut tout changer en dépit d'un dénominateur commun géographique), les différents voisins rencontrés, que l'évolution extérieure des immeubles qui connaissent un lent mais inéluctable délabrement à l'image de tout ce qui l'unissait à cet endroit, à l'exception de sa mère qui reste à ses côtés, présence bienveillante et plus active qu'en apparence. De même que pour les deux films cités, les petites bizarreries rigolotes (l'entraînement et les surveillances nocturnes) prendront un sens nouveau à divers endroits du récit, et surtout en vertu de la finalité qui offre un beau regard sur la situation des immigrés au Japon.
Bref, une belle comédie dramatique douce-amère comme sait les composer Nakamura, portant ici sur la vie en communauté que l'on a pas fini de découvrir et de connaître selon différents points de vue, à travers le temps qui passe, et le regard de ce jeune homme qui, par-delà ses soucis, incarne surtout une jeunesse qui craint de grandir et d'évoluer dans un monde pas rose. Ainsi, de belles leçons de vie nous sont adressées, sans forcer le trait, sur la nécessité de laisser le passé derrière soi pour avancer, sans nier pour autant un parcours qui, aussi insolite était-il, a été l'occasion d'expériences et de mises à l'épreuve enrichissantes qui n'ont rien à envier de celles qu'on aurait pu connaître à l'extérieur de cette bulle, d'ailleurs loin d'être aussi protégée et hermétique que ce qu'on pouvait croire au début.