Se retrouvant seule pour condenser ce qui au départ aurait dû tenir 5 saisons en un épisode final, Lana Wachowski essaye du mieux qu'elle peut de conclure sa série après son annulation par Netflix pour faute d'audience. Et c'est bien là la frustration que laisse cet épisode final de 2h30, celle de devoir forcer une conclusion à toute les pistes qu'avaient laissés les deux premières saisons de la série.
Les conséquences inévitables des réécritures ne se font pas attendre. Toute les sous-intrigues de chacun de nos huit Sensitifs qui promettaient leur lot de possibilités sont purement et simplement abandonnés pour uniquement se concentrer sur la libération de Wolfgang.
La montée politique de Capheus et la carrière d'acteur de Lito sont seulement évoqués. La vengeance de Sun envers son frère et son allié politique, bouclée en un dialogue. Les guerres de gangs à Berlin, oubliés.
La trame devient aussi beaucoup plus simple. Ne partant que sur une seule direction, éliminer une bonne fois pour toute les menaces qui pèsent sur nos héros. Les révélations sur les motivations de Whispers et l'apparition d'une organisation de Sensitifs n'apportent rien. Les objectifs restent les mêmes du début à la fin. Rien n'a le temps d'être développé (les Homo-Sapiens impliqués dans l'histoire n'ont aucune difficulté à croire l'existence d'une nouvelle espèce), tout le développement de nos héros ne sont plus conditionnés que par la défaite des vilains.
En fait il faut attendre la seconde partie de l'histoire
(après la libération de Wolfgang)
pour que le tout puisse enfin respirer. Les Sensitifs sont enfin réunis physiquement, et même si l'on n'a pas droit aux introspections philosophiques censés nous faire réfléchir, Lana Wachowski n'oublie pas de nous rapprocher de ses personnages. Leurs interactions sont toujours aussi amusantes à suivre et les scènes les plus intimistes sont toujours là et dégagent toujours autant de force à travers l'image (la connexion de tous les protagonistes entre-eux et avec les écouteurs). Cette scène viendra d'ailleurs amener une touche particulièrement ingénieuse, leurs amis. Ceux qui jusque là n'étaient que des soutiens font partie intégrante de l'histoire, partageant la connexion avec eux par d'autres moyens, les accompagnant plus que jamais envers et contre tout
(participant même au combat final, même si l'on peut se questionner sur leur manque de scrupules à commettre autant de meurtres que nos 8 héros)
, chacun a le droit de briller
(en particulier Kala dont l'évolution et son choix envers ses deux amants représentent les enjeux les plus forts et sont en accords avec les thématiques libertaires prônées par la saga) pour finalement les faire participer à la scène d'amour finale (l'une des plus belles scènes de la série).
Le fait que cet épisode coche des cases n'entache pas la mise-en-scène. Malgré des fautes de goûts
(La scène de la discothèque illisible. Whispers et Lila dégommés au lance-roquette, pouf, scène suivante. Les multiples échangent des personnages secondaires ridicules lors du mariage qui donnent une sensation de mauvaise fanfic)
, la réalisation continue de surprendre et apporte son lot d'action, de plans évocateurs et de scènes fortes aboutissants plus en bien qu'en mal le parcours de nos personnages avec des scènes à classer parmi les meilleures de la série. Le divertissement est assuré, il y a juste une grosse sensation d'inachevée pour avoir terminé ce qui aurait pu aller beaucoup plus loin. On en attend plus qu'une conclusion pour nos héros et pour une série qui avait placé la barre tellement haut à ses débuts.
C'est ainsi que se termine l'une des séries les plus visionnaires de la télévision. Mille choses restaient encore à faire mais le rendu est très honorable avec tous les enjeux que Lana Wachowski avait sur les épaules. Maintenant que l'aventure est terminée (si toutefois elle ne compte pas la poursuivre), on peut passer à autre chose. On se demande ce que les sœurs Wachowski préparent pour la suite de leur carrière, en espérant qu'elles aient plus de chances qu'avec cette série.
(C'était obligatoire de conclure tout ça avec un plan sur un godemiché ? Peut-être que ça évoque beaucoup plus pour les créateurs mais il y avait plus symbolique, non ?).