Jubilatoire
Il fallait être audacieux pour exhumer de l’oubli collectif le personnage de Séraphine Louis, dite de Senlis, peintre qui a illustré modestement à son heure, le modernisme naïf. Courant d’art dans...
le 16 sept. 2014
11 j'aime
5
Il fallait être audacieux pour exhumer de l’oubli collectif le personnage de Séraphine Louis, dite de Senlis, peintre qui a illustré modestement à son heure, le modernisme naïf. Courant d’art dans lequel elle évoluera en courant d’air. Sa peinture est aussi radicale que sa vie de femme et d’artiste, les deux s’entremêlant, se fusionnant. Et Martin Provost ne s’y trompe pas !
Il a su saisir le mystère qui entoure sa personnalité mystique quasi immaculée, quelque peu décalée et profondément attachante. Par petites touches, il retrace son incroyable parcours. Il évoque avec beaucoup d’empathie et d’admiration cette femme de nulle part, bonne à tout faire pour quelques sous, qui dans un état de transe se transforme la nuit en créatrice d’œuvres foisonnantes dont la nature comme être vivant en est le cœur.
Les scènes courtes s’enchaînent somptueuses, fragiles et se teintent d’un réalisme saisissant. La lumière et le cadre sont somptueux. Les scènes où Séraphine est placée au cœur de la nature, luxuriante et étonnamment palpable, irradient d’incandescence. On retrouve ici d’ailleurs une certaine filiation avec « Un dimanche à la campagne » de Tavernier. Par contraste hors de ce cadre, la grisaille submerge tout. L’artiste en soit n’existe pas, cet être angélique est poussé par une volonté, qu’elle pense divine, mais qui n’est autre qu’une perception unique et primaire de la beauté. Séraphine, contrainte dans sa vie, se lâche dans son œuvre, seul moyen pour elle de se faire entendre ou respecter.
Cette vision brillante surprend, impressionne et vous touche profondément, le dernier plan vous laissant un goût doux amer à l’image des œuvres de l’artiste. Emotion démultipliée également par l’incarnation du peintre par une Yolande Moreau qu’on savait déjà formidable ("Quand la mer monte") mais qui ici dépasse le cadre même de la performance, elle est Séraphine, jusqu’au bout des ongles, à la limite de l’absolu. Le film repose sur elle entièrement et c’est aussi dans ce sens qu’il est aussi habité par la grâce et extrêmement jubilatoire.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Cinéma et peinture, Les meilleurs biopics, Les meilleurs biopics de peintres, Les meilleurs films français et Les meilleurs films primés aux César
Créée
le 16 sept. 2014
Critique lue 992 fois
11 j'aime
5 commentaires
D'autres avis sur Séraphine
Il fallait être audacieux pour exhumer de l’oubli collectif le personnage de Séraphine Louis, dite de Senlis, peintre qui a illustré modestement à son heure, le modernisme naïf. Courant d’art dans...
le 16 sept. 2014
11 j'aime
5
Ce film doit énormément à l'interprétation de Yolande Moreau, fabuleuse, vraiment habitée par ce personnage de fausse naïve (comme ses oeuvres d'ailleurs), tour à tour simple travailleuse, artiste...
Par
le 1 nov. 2010
10 j'aime
Un trés beau film sur une peintre qui ne fait pas partie des stars de la peinture mais qui mérite d'être reconnue. Séraphine de Senlis n'a pas transcendé la peinture dans sa technique et en innovant,...
le 9 janv. 2012
6 j'aime
Du même critique
Ce n'est pas sans un certain plaisir que l'on retrouve le juge d'instruction Anne Gruwez qui a déjà fait l'objet d'un reportage pour l'émission Strip-tease en 2011. Sept ans après, ce juge totalement...
le 12 févr. 2018
59 j'aime
7
Qu’il est difficile d’appréhender un avis sur une œuvre dont la fiction se mêle aux souvenirs de mon propre vécu, où une situation, quelques mots ou bien encore des personnages semblent tout droit...
le 24 août 2017
56 j'aime
10
Indiscutablement « Tale of tales » sera le film le plus controversé de l’année 2015, accueil mitigé a Cannes, critique divisée et premiers ressentis de spectateurs contrastés. Me moquant éperdument...
le 3 juil. 2015
48 j'aime
11