Après avoir étanché sa soif de vengeance envers Sony avec un Black Mask 2 plus punk que jamais, Tsui Hark s'accorde une pause au cours de laquelle germe en lui l'idée de produire une série télé adaptée du roman fleuve Les Sept Epées du Mont Céleste de Liang Yu-Sheng ( A qui l'on doit également le livre à l'origine du sublime The Bride with White Hair ). Mais une fois le projet mis en chantier, il va prendre la décision de réaliser un long métrage à part ( ou en plus ) de la série.
Envisagé comme une fresque épique des temps modernes, Seven Swords arrive sur les écrans alors que les tentatives sont légion : Zhang Yimou a déjà pondu les horribles Hero et Le Secret des Poignards Volants, Chen Kaige fait Wu Ji la même année... Mais en grand Cinéaste-du-refus, Tsui Hark entend livrer un spectacle total, meilleur que ses contemporains.
Tout comme Chen Kaige, il compose un casting hybride, piochant aussi bien à Hong Kong qu'à Taiwan, à l'opéra de Pékin ou encore en Corée et parvient sans effort à rendre le tout homogène et crédible. Et surtout, il s'accapare Liu Chia-Liang, légendaire cinéaste de la 36e Chambre, pour interpréter Maître Fu, le moteur de l'intrigue.
Pour la musique, Tsui Hark va débaucher Kenji Kawai, qui livre une de ses meilleures bandes originales. Une partition épique, mémorable des années après le film, et qui va jusqu'à évoquer le Ennio Morricone des grandes heures. La scène où les sept retrouvent les enfants à la fin en est le parfait exemple.
Le grand Tsui supervise lui-même la création des sept épées éponymes, prouvant une fois de plus qu'il est un monstre d'inventivité. Originales, cinégéniques, elles viennent par leur nature souligner un trait de caractère des sept qui les portent. Ma préférée "Heaven's Fall" ( "Infini" en Français ) mériterait un film à elle seule !
Et de ces épées-personnages se dégagent les thèmes développés : La rédemption, le regain de confiance, la connaissance de soi...
Tourné autant que faire se peut en décors naturels ( tout le village est construit au beau milieu de la Chine ) Seven Swords va s'avérer un cauchemar logistique et physique. Des chaleurs du désert au froid glacial des montagnes, Tsui arrache à la nature ses images les plus saisissantes et revient avec un film de quatre heures impossible à distribuer. Alors il a tronqué.
C'est là que le film va trouver ses plus sérieuses lacunes. Avec ces coupes brutales, ces enchevêtrements de flash-backs et ses omissions volontaires, le film exige du spectateur une attention de tous les instants. Par conséquent, absorber le film entier ne se peut qu'au prix de multiples visions. Moi même, à la première, je lui en ai voulu de m'expliquer que Xin Long Zi a été élevé par des loups moins de vingt minutes avant la fin du film !
Malgré tout, Tsui Hark étant un fabricant d'images forcené, le film demeure une épopée sauvage et magnifique. L'avalanche de combats des vingt dernières minutes clouera sur place n'importe quel spectateur.