Bêtes de sexe
Un thriller au ton cynique et au scénario alambiqué, qui s'inscrit dans la lignée des thrillers érotiques des années 90 lancés par Basic Instinct, et qui dans le cas présent multiplie les fausses...
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le 2 janv. 2018
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M'étant servi d'un extrait de Sex crimes (Wild things en VO) pour un fan trailer, je l'avais sous la main, mais hésitais à le voir, l'ayant mis de côté pendant deux ou trois ans. Il a une mauvaise moyenne sur SensCritique, mais le fait que le réalisateur, John McNaughton, ait intégré les Masters of horror, et la présence de Bill Murray au casting, ont pesé dans la balance. Surtout que Bill Murray semble très regardant par rapport à ce dans quoi il joue.
J’ai longtemps trouvé navrant cette traduction française du titre, qui transforme Wild things en Sex crimes, probablement pour attirer plus de spectateurs, mais finalement, les deux font sens.
Wild things peut avoir une large signification, ça peut aussi bien désigner les actes, sexuels ou criminels, des personnages, que les animaux qui peuplent le film : des prédateurs comme les crocodiles, qui servent de métaphore pour les personnages justement.
Mais "sex crimes", c’est la première chose qu’on lit après le générique de début, sur un tableau, et le terme se voit être détourné, ne désignant pas tant des crimes d’ordre sexuel dans le film, mais des manipulations s’appuyant sur le sexe, à des fins criminelles.
Le film se déroule en Floride, d’où la présence de marais où traînent les crocos, mais la Floride, ça évoque aussi une atmosphère chaude, torride. Et il faut croire que tous les personnages de Sex crimes sont en chaleur.
L’intrigue débute dans un lycée, où des adultes incarnent des adolescents libidineux, qui se matent, s’envoient chier, balancent des blagues scabreuses en tous sens… chose que je trouverais navrante d’habitude, mais qui m’a amusé, pour une fois.
Les personnages ont beau avoir environ 18 ans, pas d’ado acnéique, non non. Denise Richards par exemple, 27 ans à l’époque, joue l’une des étudiantes, Kelly. Une bimbo à l’attitude ultra aguicheuse, qui fait tout pour draguer le conseiller d’orientation, Sam Lombardo, homme beau et musclé reluqué par toutes les élèves. Je trouvais déjà le film très racoleur, mais Kelly propose ensuite de laver la jeep de Sam, avec une amie. Elles s’arrosent, se mouillent, et se courbent, au ralenti. J’ai halluciné.
Ce n’est pas juste l’omniprésence de la sexualité qui donne au film des airs de porno, mais la façon gratuite dont c’est présenté, qui produit de plus un effet comique involontaire. Par exemple, l’école appelle la mère de Kelly en raison de son absentéisme, et elle est en train de baiser quand elle répond au téléphone.
Mais je ne savais pas toujours ce qui était censé être comique ou non. Car il y a bien le personnage de Bill Murray, qui interprète un avocat mais tient, encore, un rôle décalé. C’est dommage, surtout que ça ne se prête pas au film, et j’ai l’impression que l’acteur n’était pas à l’aise ; en tout cas, les gags m’ont paru forcés.
Déjà qu’il menace un témoin durant un procès de retourner en centre de détention, ce qui n’est pas bien crédible…
En effet, Sam Lombardo se prend un procès, accusé de viol par l’élève susmentionnée, ruinant ainsi sa réputation en ville. Le doute plane jusque là pour le spectateur, puisqu’on n’a pas vu le viol, mais on suspecte évidemment qu’il s’agisse d’un complot.
Je dois dire que j’attendais du film qu’il soit un bon substitut à Basic instinct… mais le scénario ici se veut malin sans l’être réellement.
Il y a un gros twist en milieu de film (ça veut dire à environ 50mn, pour la version longue), assez grotesque, et pendant un temps, on en reste là. Pendant 30mn il ne se passe rien qui n’ait déjà été prévu, ça traîne et on s’ennuie, puis il a un nouveau twist grotesque. Et un autre. Et encore un autre.
Le problème c’est que le scénariste pense qu’il suffit de nous balancer des retournements de situations pour qu’on soit satisfait, or ces twists ne sont jamais cohérents.
Dans le film de Verhoeven, tout était extrêmement bien ficelé et justifié, même les scènes de sexe, qui avaient carrément une fonction.
Avec Sex crimes, c’est juste gratuit : les trois complices sont ensemble, ils sont contents, allez, on baise ! Les deux filles sont dans la piscine, elles se battent, et puis allez, on baise !
J'ai lu un truc qui m'a amusé sur IMDb : "Director John McNaughton says he deleted a scene that would have shown Matt Dillon and Kevin Bacon showering together, as it was gratuitous." Bien sûr...
Et lorsqu’il n’y a ni sexe ni twist, le film est juste mou, tirant en longueur ce qui pourrait être rapidement expédié : regardez notamment comme on passe trois plombes à montrer le policier parler de ses doutes à sa collègue après la disparition d’une des suspectes, puis discuter avec un étudiant, ramasser des preuves, parler de ses doutes à son patron et avoir une dispute qu’ils ont déjà eu avant, etc…
Je ne sais pas pourquoi j’ai placé quelques espoirs en Sex crimes, pourquoi j’ai voulu croire que, d’une façon ou d’un autre, le film aurait pu être mésestimé. Non, c’est mauvais, tout simplement. En revanche, il faut avouer que la réalisation de McNaughton n’est pas mal, et que la musique est très bonne, évoquant là encore l’idée de prédation.
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste On rajoute "sexe" dans le titre français, ça va attirer le public
Créée
le 29 avr. 2015
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