Déjà le cinquième volet de cette série démarrée deux ans plus tôt. La réalisation passe aux mains de Kazuo Ikehiro, un réalisateur assez intéressant qui a fait l'essentiel de sa carrière à la Daiei, celui-ci nous ayant offert plusieurs volets de très bonne facture des sagas Zatoichi (trois en tout) et Nemuri Kyōshirō (quatre) ainsi que quelques chanbaras pas vilains du tout. Comme d'habitude avec cette série, l'épisode reprend là où s'était arrêté le précédent, avec cette fois-ci une légère uchronie puisque le ninja Saizo parvient à s'échapper des ruines du château d'Osaka assiégé (mai 1615) avec son maître Sanada Yukimura. Dans la réalité ce dernier s'est illustré en combattant jusqu'au bout les forces des Tokugawa et a trouvé la mort au champ d'honneur.
Saizo et le seigneur Sanada se rendent alors chez les Shimazu, un clan historiquement hostile aux Tokugawa et relativement bien protégé de par sa situation géographique tout au sud de l'archipel, où ils espèrent reconstituer un vivier de forces et relancer une attaque contre le shogun Tokugawa. Pour cela, ils comptent sur les fusils produits à Tanegashima, une île qui reproduit et améliore des fusils à mèche portugais (l'amélioration par les ingénieurs japonais des technologies occidentales ne date pas d'hier...), et particulièrement un modèle capable de tirer trois coups, qui comblerait le désavantage numérique de l'alliance anti-Tokugawa.
Mais les Tokugawa ne restent pas sans rien faire. Ayant noyauté le territoire Shimazu d'un réseau d'espions dirigés par le maître-ninja Hattori Hanzo et le très influent abbé Sūden (un personnage historique à la vie trépidante), ils tentent de déjouer le complot qui se trame contre eux en envoyant des assassins à la poursuite de Sanada et Saizo.
Cet épisode se distingue par une photographie de grande qualité, je ne dis pas que les précédents n'étaient pas bons de ce point de vue, mais il y a ici un cadrage et une dynamique très maîtrisés, on a affaire à une équipe qui connaît son sujet, la fameuse touche Daiei. Comme d'habitude avec cette série l'intrigue puise très largement dans le contexte historique, en l'occurrence ici les rapports ambigus entre le clan Shimazu et le pouvoir des Tokugawa (ce sont d'ailleurs les Shimazu qui mèneront la révolte qui renversera le shogunat 250 ans plus tard), et le système original de l'économie japonaise sous les Tokugawa, qui autorisent certaines îles à commercer avec les étrangers (ici les Portugais et les Anglais, les Chinois devant passer par d'autres intermédiaires). On a donc en parallèle à notre affaire de ninjas plusieurs intrigues sous-jacentes de contrebandiers chinois, de sœurs cherchant à venger leur père, ce qui brouille les pistes et participe à l'originalité de cet épisode.