On a tous nos biais, le mien me vient de mes lectures du moment. Parmi elles H. Zinn et son histoire de l'Amérique. Dans celui-ci l'auteur décrit les massacres et l'organisation de l'esclavage mis en place par les européens au rang desquels figurent en bonne place les portugais. Zinn mentionne alors le comportement de l'église catholique il ne semble pas y croiser de nombreux croisés de la foi sacrifiant tout pour leur dieu. En tout cas cette volonté n'est pas représentative et est accompagné d'un asservissement et d'une destruction des cultures locales. Voir les portugais de cette époque, dans le film, animés de si bonnes intention m'a gêné tout le long du film quand je pensais à leur comportement en Afrique et en Amérique.
Le film à cet égard témoigne cependant de la supériorité morale dont les prêtres se parent, à travers l'exemple de l'absence curiosité vis à vis de la langue et de la culture japonaise. Cependant les héros du film restent des héros éloignés de toute considération politiques, venus apporter la vérité au peuple japonais. Si le film émet des critiques celles-ci sont aussitôt évacuées par le personnage principal, vénérable prêtre portugais (qui parle anglais) et quasi-christ. C'est de là qu'est venu mon malaise pendant le film.
Ainsi qu'à la fin lorsque dieu parle au personnage principal, si l'on ne crois pas en dieu, la seule solution interprétative étant de psychiatriser le prêtre pour donner un sens rationnel à la scène. Ce qui enlève au personnage une part de sa complexité, il devient tout simplement fou. Il y a une grande différence entre montrer quelqu'un qui entend dieu et entendre directement dieu. Cette manière de présenter la mystique chrétienne nous enferme dans les croyances du réalisateur.
Traiter de l'histoire dans un film est une tâche extrêmement complexe, Scorcese le fait avec quelques biais mais aussi de passionnantes pistes de réflexion. Le filtre chrétien est légèrement pesant mais pas tout à fait insurmontable.