D'une tension palpable à une mise en scène atmosphérique, de la beauté des décors à la construction parfaite des cadres, d'une réflexion intérieure personnelle qui devient commune (que l'on soit croyant ou non), il n'y a qu'un pas que franchis Martin Scorsese avec un classicisme et une hargne qui lui sied. Deux prêtres jésuites portugais, (Andrew Gafield et Adam Driver) sont en quête de leur mentor, (Liam Neeson) perdu au Japon en plein 17ème siècle. Cette quête se transforme en réflexion intérieure sur leur croyance religieuse. Une réflexion qu'ils devront confronter à la dure réalité du pays à cette période ou la chrétienté est illégale et les croyants persécutés.
Doté d'une triple narration épistolaire limpide, (sans jamais qu'elle ne s'entrecroise), le film avance au fur et à mesure d'un voyage cathartique d'une beauté et d'une dureté frontal, où les symboles se confrontent aux croyances, où deux concepts religieux s'opposent, où la foi se confronte à la mort.
Martin Scorsese est chrétien et ce film peut se voir comme sa profession de foi, mais plutôt ses interrogations par le biais de cette histoire vraie.
Interrogations, car le réalisateur se met à distance de la réflexion de chaque personnage. Pas de leurs actes et ressentis, (au contraire il resserre les plans quand il le faut sur leurs ressentis et est d'une dureté réaliste lors des scènes de tortures) mais de leur réflexion. Il laisse libre cours à de nombreuses interrogations: Que représente la foi? Ou est-on prêt à aller par croyance? Le sacrifice est-il acte de foi dans les situations présentées? La foi est-elle vérité ou croyance? Quelle place occupe les symboles dans la croyance? et bien d'autres encore.
En soit Scorsese n'apporte que très peu de réponses à ces interrogations, et laisse un large espace au spectateur pour qu'il se fasse ses propres idées et réfléchisse par lui-même. Scorsese n'est pas donneur de leçons et la réussite du film est dans cet aspect majeur. Il nous fait le récit de ce voyage, de cette histoire dramatique qu'il l'a touché. Avec un mise en scène grandiloquente, un récit linéaire, Scrosese retrouve aussi la thématique qu'il a beaucoup travaillé de la folie humaine par le biais de plusieurs personnages et certaines scènes très bien amenées.
Même si le film est trop long et répétitif au cours de sa deuxième partie et aurait mérité quelques coupes au montage, il en ressort un voyage atmosphérique, dur mais cathartique, à la réflexion libre. Une très belle oeuvre de cinéma.